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« Préférer les banques aux peuples est une faute politique majeure pour un socialiste. » dixit Montebourg

Raoul Marc Jennar | jennar.fr | 25 mai 2011

mercredi 25 mai 2011

Bonjour,

Après mon départ du NPA, de bons esprits, incapables de comprendre ma volonté de redevenir ce que je n’aurais jamais du cesser d’être – un intellectuel engagé mais libre – ont gentiment annoncé que j’allais passer au PG. Pour des raisons alimentaires, de surcroît ! Je ne suis toujours pas au PG, même si j’apprécie beaucoup - mais pas tout – de la démarche de Jean-Luc Mélenchon. Mais l’incapacité du Front de Gauche à s’ouvrir aux Alternatifs, à la FASE, à tous les unitaires à la gauche du PS me consterne. Et ma liberté m’incite à regarder partout où le renouveau socialiste espéré lors de la création du NPA semble poindre.

Il y a peu, j’ai lu le livre d’Arnaud Montebourg « Des idées et des rêves ». Ce livre m’a beaucoup plu parce qu’il reprend des thèmes chers au mouvement altermondialiste et en particulier à Walden Bello, un universitaire philippin qui analyse la mondialisation néolibérale comme un phénomène nuisible qui frappe également le Nord et le Sud. Mais aussi un militant très actif du réseau « Notre monde n’est pas à vendre » que j’ai côtoyé à de multiples reprises. Il m’a plu aussi parce que chaque chapitre se termine par une série de propositions concrètes.

Incontestablement, Montebourg, dont je ne n’oublie pas ses campagnes pour une VIe République bien avant l’arrivée de l’actuel occupant de l’Elysée et contre les paradis fiscaux bien avant la crise de 2008, tranche avec la direction du PS et cette génération des Fabius, Aubry/Delors, Hollande, Royal, Moscovici, etc. qui a renié le socialisme. Force est de constater qu’aucune des idées novatrices de Montebourg n’est reprise dans le projet du PS, ni sur la VIe République, ni sur le capitalisme, ni sur l’écologie.

Mélenchon, Montebourg. Voilà deux acteurs politiques que j’aimerais voir ensemble. Voici un entretien de Montebourg dans Libé d’hier.

Hollande et Aubry nous ont fait perdre en 2002″

Député et président du conseil général de Saône-et-Loire, Arnaud Montebourg analyse les conséquences pour le PS de « l’affaire DSK », défend sa candidature « définitive » à la primaire du PS contre les candidats du système Hollande et Aubry et détaille son projet de « démondialisation », auquel il consacre un livre (1) qui sort demain.

Que change le forfait de DSK pour le Parti socialiste et pour vous ?

Ça ouvre le jeu. Je n’exclus pas, pour ma part, puisque ma candidature est définitive, d’être au deuxième tour de la primaire. L’élimination de Dominique Strauss-Kahn est une affaire judiciaire d’ordre personnel. Elle ne peut pas avoir de conséquences politiques.

Il ne faut pas suspendre la primaire ?

Nous avons à retrouver la confiance avec les Français. La primaire a cet objectif en les associant au choix. Il est hors de question de déconstruire ce que nous avons patiemment construit dans le cadre de ces retrouvailles.

Vous publiez ce livre à un mois du dépôt officiel des candidatures. Est-ce pour relancer votre campagne ?

Je ne suis pas écrivain, je suis un acteur politique. Mon livre est un outil de campagne. Les médias ont le nez sur les sondages, mais les Français se cherchent un avenir, le chemin qu’ils veulent donner à notre pays et la place qu’ils y trouveront. Le débat de la primaire doit être un débat d’orientation. Les derniers événements liés à la crise réclament un renouvellement profond de nos choix. La preuve en est ce qui se passe en Espagne (lire pages 4 à 6) où les socialistes qui accompagnent les marchés sont considérés comme étant inutiles ou identiques à la droite.

Ce que vous appelez le « socialisme d’accompagnement » et que vous combattez…

Je défends la naissance d’un nouveau socialisme parce que la crise est en train de mettre au pas les peuples. Le socialisme de l’ajustement, c’est le socialisme qui conduit à ce qu’on soutienne Christine Lagarde au FMI, c’est-à-dire que sur les orientations politiques, il n’y a pas de différence entre la droite et la gauche européennes, qui sont favorables à sa candidature. Le FMI de Christine Lagarde c’est le même que le FMI de Dominique Strauss-Kahn, c’est une machine qui se retourne contre les peuples. Préférer les banques aux peuples est une faute politique majeure pour un socialiste.

Qu’est-ce qui vous différencie des autres ?

Les candidatures de François Hollande et de Martine Aubry sont parfaitement légitimes, parfaitement logiques et parfaitement identiques. Elles sont solubles dans la mondialisation. Elles ne remettent pas en cause le système. Ce sont des gestionnaires du moindre mal. Ce qui est en train de se passer – la montée du rejet du politique – a un rapport direct avec le fait que les dirigeants, y compris de gauche, ont théorisé leur propre impuissance.

François Hollande dit qu’il veut être un président « normal ». Et vous ?

Un président de réconciliation des Français, un président créatif, innovant et mettant au pouvoir tous ceux qui inventent la nouvelle France. Il faut bâtir la France du XXIe siècle avec les idées qui sont en train de naître dans la société.

Comment êtes-vous arrivé à l’idée que la démondialisation devait être votre axe de campagne, voire celui de la présidentielle ?

C’est une conscience ancienne, des idées qui ont été réveillées plus fortement par la crise de 2008-2009. Il n’y a pas de sortie de crise possible sans renaissance de la politique. Le nouveau socialisme, c’est rendre la politique plus forte que la mondialisation. C’est un chemin plus difficile, plus audacieux, mais indispensable pour éviter des désastres futurs. Moi, je suis candidat à la transformation du système, pas à la gestion du système.

Mais vous prônez le retour au protectionnisme comme Marine Le Pen…

Je combats le protectionnisme de l’extrême droite. Le protectionnisme que je défends est un protectionnisme de progrès. La démondialisation, c’est la préférence à la production sur place plutôt qu’importée, la préférence pour les salaires plutôt que les dividendes et pour l’environnement plutôt que la destruction des ressources naturelles. C’est un protectionnisme vert, social et de progrès.

Le projet du Parti socialiste, qui contient des propositions pour lutter contre la mondialisation, ne vous va pas…

Le projet est un rez-de-chaussée dans lequel tout le monde peut se retrouver. Je propose pour ma part de construire les étages de la nouvelle France, notamment sur les questions de démondialisation, de capitalisme coopératif, de VIe République, de mise sous tutelle du système capitaliste et bancaire. C’est le minimum de ce qu’il faudrait imaginer pour reprendre la main sur l’économie avant que celle-ci nous esclavagise. Aucune proposition du PS ne va dans le sens de mettre une bride sur le cheval de la finance devenu fou.

Les socialistes pourront vous reprocher d’avoir gardé sous le coude vos propositions au détriment du projet collectif…

J’ai défendu depuis dix ans la fin des paradis fiscaux, la VIe République… J’ai proposé tout cela sous forme d’amendements qui ont été aimablement rejetés. On ne peut pas considérer que le débat n’a pas eu lieu. Il a été rétréci mais il a eu lieu. Ma stratégie est une stratégie de construction de l’après. Je suis le candidat du renouvellement des idées et des hommes.

On voit mieux vos idées aujourd’hui mais qu’en est-il des hommes ?

Ce sont tous ceux qui commencent à rejoindre ma candidature, dont vous entendrez parler bientôt, et qui ne sont pas les habituels barons du PS.

C’est encore une critique en creux de François Hollande et de Martine Aubry…

J’ai envie de dire que ce sont les mêmes qu’il y a dix ans. Ce sont ceux qui nous ont fait perdre en 2002, qui avaient déjà rédigé le projet à cette époque, qui sont candidats en 2012. Par ailleurs, je considère être le meilleur rassembleur de toutes les gauches. Jean-Luc Mélenchon a dit qu’il ne serait pas candidat si j’étais le candidat du PS (lire ci-contre), Jean-Pierre Chevènement a dit qu’il voterait pour moi s’il votait aux primaires. Nicolas Hulot a déclaré que j’étais le meilleur candidat écologiste et Christiane Taubira est dans mon comité de soutien. Donc quand vous me dites « avec qui ? », je vous réponds : moins de barons, plus de personnalités. Je considère que ma candidature rassemble au-delà des appareils et du vieil appareil du PS.

Dans votre livre, vous faites le procès des politiques qui ont baissé les bras. Pourquoi vous, vous y arriveriez mieux ?

On peut considérer que la conflictualité n’est pas nécessaire, qu’il faut se couler dans un moule qui n’est pas le nôtre. A accepter cela, le PS disparaîtra. Ma position, c’est que la politique doit être plus forte. Donc la question, c’est la quantité à mettre dans la seringue de l’action politique. C’est le sens de ma candidature.

Propos recueillis par Laure Bretton

Libération, 24 mai 2011

(1) « Votez pour la démondialisation ! », Flammarion. 92 pp., 2 euros.


Voir en ligne : Montebourg : « Préférer les banques aux peuples est une faute politique majeure pour un socialiste. »

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