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La circoncision protège bien les femmes contre les HPV

Dr Anastasia Roublev | jim.fr | 10/01/2011

lundi 10 janvier 2011

Depuis le début du 20ème siècle des constatations épidémiologiques ont montré que le cancer du col de l’utérus était moins fréquent dans les populations pratiquant la circoncision. A mesure que le rôle des papillomavirus humains (HPV) était mis en évidence dans la genèse de ces néoplasies, il est apparu que l’effet favorable de la circoncision sur cette pathologie pourrait s’exercer par le biais d’une réduction des infections à HPV. Cependant, les résultats des études observationnelles dans ce domaine étant toujours perturbés par de multiples facteurs de confusion (notamment culturels), il a fallu attendre les premiers essais cliniques randomisés sur la circoncision conduits en Afrique au début du 21ème siècle pour mieux évaluer l’impact de cette intervention sur l’épidémiologie de diverses infections sexuellement transmissibles (IST).

Les premières études randomisées sur la circoncision

Ces essais ont été conduits en Afrique de l’Est et du Sud sous l’égide de l’OMS et grâce au financement de diverses organisations non gouvernementales dont la fondation Bill et Melinda Gates. Succinctement jusqu’ici ces études cliniques ont démontré que, pour l’homme, la circoncision diminuait d’environ 50 % la probabilité de contamination par le VIH et de 35 % le taux de nouvelles infections par un HPV à haut risque carcinologique.

Pour les partenaires féminines des sujets ayant été circoncis dans le cadre de ces études, la situation est plus complexe car si le taux d’ulcérations génitales, d’infections à Trichomonas vaginalis et de vaginoses bactériennes est bien réduit, le risque de transmission du VIH de l’homme à la femme n’est pas diminué. La même équipe qui avait publié ces données négatives en 2009, présente aujourd’hui dans le Lancet les résultats de cet essai qui concernaient les infections à HPV (1).

Une réduction de 23 % de l’incidence des infections à HPV à haut risque

Dans ce travail conduit dans le district de Rakai en Ouganda, les partenaires féminines séronégatives pour le VIH d’hommes également séronégatifs ayant été assignés de façon randomisée à une circoncision immédiate ont été suivies durant 2 ans.

A l’issue de cette période de surveillance, la prévalence des infections à HPV à haut risque carcinologique était de 27,8 % dans le groupe circoncision contre 38,7 % dans le groupe contrôle soit une réduction significative de 28 % en valeur relative (intervalle de confiance à 95 % [IC95] entre – 15 et – 40 % ; p=0,001). Durant le même laps de temps, l’incidence des nouvelles infections à HPV à haut risque carcinologique qui était de 26,9/100 patientes-années dans le groupe contrôle a été ramenée à 20,7/100 patientes-années soit une réduction de 23 % (IC95 entre 7 et 37 % ; p=0,008).

La circoncision du partenaire réduit donc le risque d’infection par le HPV de manière significative, contrairement à celui de transmission du VIH. L’explication biologique de ces différences reste hypothétique.

La circoncision n’est pas la panacée

Plusieurs données soulignent cependant les limites de l’intérêt de la circoncision en tant que moyen de réduire les risques de cancer du col de l’utérus chez les femmes des pays en voie de développement qui ne bénéficient pas actuellement des vaccins anti-HPV.

 Sans que ce phénomène soit expliqué, une clearance du HPV-16 (premier sérotype en cause dans le cancer du col) a été observée moins souvent dans le groupe intervention que dans le groupe contrôle ce qui laisse planer un doute sur l’effet protecteur sur le cancer du col de la circoncision.
 Par ailleurs il faut souligner que l’on ne dispose pas de résultats cliniques portant sur les dysplasies cervicales de haut grade et a fortiori sur les cancers invasifs.
 Enfin, le niveau de protection globale obtenue pour les sérotypes à haut risque reste limité à environ 25 %.

En pratique, sans que la prévention du cancer du col puisse être considérée comme une indication en soi de la circoncision dans les régions du monde ne disposant pas du vaccin, ce travail constitue un argument supplémentaire en sa faveur pour la prophylaxie de certaines IST dans les deux sexes.

Il serait intéressant à l’avenir de déterminer si il existe une synergie entre les effets favorables (mais modestes) de cette intervention sur toutes les infections à HPV et ceux de la vaccination qui sont beaucoup plus importants mais sont limités, par construction, aux sérotypes contenus dans les vaccins.

Dr Anastasia Roublev


 1) Wawer M et coll. : Effect of circumcision of HIV-negative men on transmission of human papillomavirus to HIV-negative women : a randomised trial in Rakai, Uganda. Lancet 2011 ; publication avancée en ligne le 7 janvier 2011 (DOI:10.1016/S0140-6736(10)61967-8).
 2) Guilano A et coll. : Male circumcision and HPV transmission to female partners. Lancet 2011 ; publication avancée en ligne le 7 janvier 2011 (DOI:10.1016/S0140-6736(10)62273-8).

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