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Agressions homophobes : comment en arrive-t-on à « casser du pédé » ?

Philippe Arlin | metrofrance.com | vendredi 19 avril 2013

lundi 29 avril 2013

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Agressions homophobes : comment en arrive-t-on à « casser du pédé » ?
Philippe Arlin | metrofrance.com | vendredi 19 avril 2013

Wilfried de Brujin après son agression, le 7 avril dernier

Passage à tabac d’un couple d’hommes à Paris, députés menacés de mort, saccage d’un local LGBT à Lille, attaque d’un client de bar gay à Bordeaux… Le mouvement anti Mariage pour tous, s’il n’a pas créé l’homophobie, a en revanche ouvert les vannes de la violence. Si on admet que certaines revendications politiques relèvent de la réflexion, on peut cependant soulever que les réactions violentes transcendent le rationnel. Mais dans quelle part de notre inconscient vient se loger l’homophobie ? Entretien avec Philippe Arlin, sexologue, pour qui le problème n’est pas politique, mais profondément psychologique et identitaire.

Les débordements périphériques à la Manif pour tous ravivent les bûchers

Au-delà de l’homophobie, une misogynie latente :

« Le fond derrière toute cette polémique, c’est la misogynie. Avec ce mariage, on propose de détruire les valeurs fondées sur une structure genrée. Nous bousculons très profondément les rôles sociaux attribués aux hommes et aux femmes, et nous craignons de perdre nos repères. Fondamentalement, toute une partie de notre société est fondée sur cette distinction homme / femme. Dans l’homosexualité, l’homme prend, dans l’inconscient collectif, une position de femme. Et avec ce mariage, les opposants imaginent qu’il veut en plus légalement prendre un statut de mère. En prenant ce statut de femme il déchoit symboliquement les autres hommes. Il retire aux hommes leur attributs de virilité, et cela leur est insupportable. Le sacro-saint rôle de la femme qui fait des enfants et qui les élève est remis en question. Ce qui explique que beaucoup de femmes s’opposent également à cette loi, car on leur enlève le privilège de la maternité. Ce sont d’ailleurs les mêmes qui prônent un retour des femmes au foyer, et qui s’opposent à l’avortement. En gros, symboliquement, on coupe les couilles des hommes, et on stérilise les femmes. On leur enlève cette chose archaïque à laquelle ils s’accrochent depuis des lustres. Tous ces gens qui disent que les hommes perdent leur statut sont terrorisés à l’idée qu’on leur retire leurs prérogatives. Dès qu’on aborde des questions de genres, cela déclenche la haine. Cette haine exacerbée s’était calmée, tant que les homos faisaient des choses discrètement dans leur chambre à coucher. Cela en faisait vomir certains, mais ils ne descendaient pas dans la rue pour autant. »

La filiation

« Ce qui a déclenché la colère, au-delà du mariage, c’est la PMA et l’adoption. Cela perturbe le dogme de la naturalité. En France les hommes sont arc-boutés sur leur rôle, sur la vision biologique binaire de la sexualité et des genres. « Un papa, une maman ». Et ce qui se joue actuellement est le problème de la filiation par le mâle du nom de famille. Les hommes perdent leur pouvoir : non seulement ils ne pourront plus transmettre leur spermatozoïdes, mais en plus ils ne vont éventuellement même plus transmettre leur nom. Il n’y a qu’à voir ceux qui, dans certaines familles, font la gueule parce qu’ils n’ont pas de garçons pour perpétuer la transmission de leur nom…

Un malaise avec sa propre sexualité ?

« Les lesbiennes, même si elles sont dévalorisées et humiliées dans leur rôle de mères potentielles, sont cependant moins visées que les hommes homosexuels. Si on y réfléchit bien, ce n’est pas « baiser un mec » qui est grave, c’est « se faire baiser ». Quand on est « passif », on déchaîne la haine, c’est l’ultime tabou. Cela oblige les hommes à réfléchir sur le fait qu’ils ont un anus, et non uniquement un pénis, et qu’ils peuvent jouir avec. Il n’y a qu’à voir les réactions de certains hommes dont la compagne suggère de leur glisser un doigt durant leurs jeux érotiques. Certains vont même jusqu’à les quitter ! Cela leur renvoie une image d’eux-mêmes qui ne leur plaît pas. Derrière cela se joue la haine du semblable, de ce que l’on ne veut pas voir en soi. Attention, cela ne veut pas dire que se sont des « pédés refoulés » ! Mais cela traduit tout de même un malaise avec sa propre sexualité. Et c’est ce malaise qui peut être à l’origine de ces violences.« 

 
 

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Transmis par Nicolas deTours
 Tue, 30 Apr 2013 00:53:44 +0100 (BST)
 

 
 


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