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l’arrestation de la militante Aurore Martin par le pouvoir socialo & sa "livraison" au Partido Popular espagnol...

François Béguin | lemonde.fr | vendredi 2 novembre 2012

vendredi 2 novembre 2012


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 Les questions que pose l’arrestation d’Aurore Martin
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Les questions que pose l’arrestation d’Aurore Martin
François Béguin | lemonde.fr | vendredi 2 novembre 2012

"Provocation", "situation ubuesque"... Les
critiques se sont multipliées de la part des responsables
politiques basques, de gauche comme de droite, vendredi 2
novembre, après l’interpellation la veille à
Mauléon (Pyrénées-Atlantiques) de la
militante basque française Aurore Martin,
membre de Batasuna, en exécution d’un mandat
d’arrêt européen (MAE) émis par l’Espagne.
Après avoir
été remise aux autorités espagnoles jeudi,
la jeune femme a été placée en
détention provisoire à Madrid, en raison du "risque
évident et fondé de fuite et de soustraction
à la justice".


  • Que reproche la justice espagnole à Aurore
    Martin ?

Aurore Martin était visée depuis le 13 octobre 2010 par un MAE émis par un magistrat madrilène pour "faits de participation à une organisation terroriste et terrorisme", en l’occurrence sa participation en 2006 et 2007 à des réunions publiques et la rédaction dans le journal Gara en tant que membre du parti indépendantiste basque Batasuna.

  • Comment fonctionne un MAE ?

Le MAE concerne les personnes recherchées par la
justice au sein de l’Union
européenne
et condamnées ou susceptibles
d’être condamnées à une peine d’au moins un
an de prison. Il avait été mis en place au
lendemain des attentats du 11-Septembre pour faciliter et automatiser les procédures
d’extradition entre Etats membres.

  • Est-il possible de ne pas donner suite à
    un MAE ?

L’article 695-22 du Code de procédure
pénal
prévoit plusieurs conditions dans
lesquelles un Etat peut ne pas donner
suite à un MAE. Il peut ainsi être
refusé "s’il est établi que ledit mandat
d’arrêt a été émis dans le but de poursuivre ou de condamner une personne en raison
de son sexe, de sa race, de sa religion, de son origine
ethnique, de sa nationalité, de sa langue, de ses
opinions politiques ou de son orientation sexuelle".

Les partisans d’Aurore Martin estiment ainsi qu’elle est
poursuivie pour des raisons politiques. "C’est un
précédent en France,
expliquait-elle dans
un entretien à Médiapart en juin
2011
. Demain n’importe quel pays pourra
réclamer un ressortissant français pour x
raisons. Au niveau politique,
c’est grave."

  • Aurore Martin avait-elle encore des recours avant
    d’être remise aux autorités espagnoles ?

La cour d’appel de Pau, la Cour de cassation puis en mai la
Cour européenne des droits de l’Homme ont successivement
validé ce MAE. "Toutes les voies de recours ont donc
été épuisées
, souligne Henri Labayle,
spécialiste du droit européen de l’immigration et
de la sécurité intérieure européenne
et professeur à l’Université de Pau et des
pays de l’Adour. La Cour de cassation ne pouvait pas
répondre autre chose
car l’apologie du
terrorisme est prévue dans le MAE. Pour l’Espagne, la
lutte contre le terrorisme passe par la lutte contre
l’apologie du terrorisme."

"Comme c’est un cas de figure qui ne s’est jamais produit,
le juge aurait pu interroger
la Cour de justice de l’Union européenne dont le
rôle est de veiller
à l’application du droit de l’Union et à
l’uniformité de son interprétation sur le
territoire de l’Union
, ajoute Henri Labayle. Le
véritable problème juridique, c’est qu’il y a un
parti qui a deux statuts différents de chaque
côté de la frontière. Batasuna est un
parti légal en France."

  • Le ministre de l’intérieur ou le premier
    ministre auraient-ils pu s’opposer
    à ce qu’Aurore Martin soit remise aux
    autorités  ?

"Non, à partir
du moment où elle est arrêtée et que les
voies de recours ont été épuisées,
la remise aux autorités espagnoles est une
procédure dépolitisée qui se fait de juge
à juge
, explique Henri Labayle. Depuis 2004,
il n’y a donc plus besoin de décret d’extradition
signé par le premier ministre. Si un ministre s’y
était opposé, il l’aurait fait en
contrariété des règles de l’Union
européenne."

  • Pourquoi le mouvement Batasuna attribue-t-il la
    responsabilité de cette arrestation et de ce
    transférement à Manuel Valls
     ?

Le mouvement Batasuna a estimé que le ministre de
l’intérieur, Manuel Valls, avait "cassé un
accord tacite"
. L’un des responsables du mouvement,
Jean-François Lefort, a noté que le MAE
n’avait pas été appliqué par l’ancien
ministre de l’intérieur, Claude Guéant. "Il y
avait un accord tacite que Valls a cassé, une
étape a été franchie
", a-t-il dit,
ajoutant : "Nous réfutons la thèse d’un
contrôle fortuit : au moment où Aurore Martin a
été arrêtée, il y avait un
important peloton de gendarmerie à un autre endroit
où elle aurait pu passer.
"

"C’est une décision politique de première
importance,
dit Henri Labayle. On ne peut pas imaginer qu’une décision
de cette importance ait pu être prise sans que Matignon
ou l’Elysée ait été mis au courant.
Même si le contrôle de gendarmerie était
fortuit, il fallait un feu vert du gouvernement pour confirmer l’arrestation d’Aurore
Martin."

  • Le juge espagnol aurait-il pu choisir de ne pas lancer
    de MAE ?

"Il y a une disproportion entre les moyens et les fins,
constate Henri Labayle. Est-ce que ce n’est pas utiliser
un marteau pour écraser une mouche ? Le MAE
devrait être réservé à des
infractions sérieuses et graves. Même si en
droit, on ne peut pas reprocher
au juge espagnol de l’avoir
utilisé."

  • Existe-t-il des exemples récents où le
    mandat a été invalidé par la justice ?

Trois jours avant l’arrestation d’Aurore Martin, mardi 30
octobre, la Cour d’appel de Pau a par exemple refusé la
remise à l’Espagne d’Arturo
Villanueva
Arteaga
pour son appartenance à un mouvement de
jeunesse radical basque déclaré illégal en
Espagne le 19 janvier 2007, invalidant le MAE émis
par Madrid contre lui. En 2010, les juridictions britanniques
avaient refusé d’appliquer
le même MAE que celui rejeté mardi par la cour
d’appel de Pau.

  • Que risque Aurore Martin en Espagne ?

Dans son entretien à Médiapart, Aurore
Martin expliquait qu’elle risque une peine maximale de douze
ans. "C’est ce qu’ils pourraient demander, dit-elle.
Ce n’est pas forcément ce qu’ils mettraient en
application."

"Il faut faire confiance
à la justice espagnole et ne pas lui faire de procès d’intention,

ajoute Henri Labayle. Je ne vois pas ce qui pourrait aboutir à une
condamnation d’Aurore Martin.
Il faudrait des
milliers de places de prison à la justice espagnole si
elle veut enfermer tous
ceux qui ont participé à des manifestations. "



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Début de polémique après l’arrestation de la militante basque Aurore Martin
| lemonde.fr | jeudi 1er novembre 2012

Aurore Martin, le 28 juillet 2011.

Aurore Martin, le 28 juillet 2011. | AFP/GAIZKA IROZ

La militante basque française Aurore Martin, membre de Batasuna, a été interpellée jeudi 1er novembre à Mauléon (Pyrénées-Atlantiques) en exécution d’un mandat d’arrêt européen émis par l’Espagne, plus d’un an après une première tentative avortée à Bayonne, ont annoncé la gendarmerie et le parquet.

La militante membre de ce mouvement radical basque, qui a
épuisé tous les recours légaux contre le
mandat de Madrid, a été interpellée sans
difficulté vers 16 heures par des gendarmes, à
l’occasion d’un contrôle routier fortuit. Elle a
été "remise aux autorités espagnoles
vers 20 h 30"
, selon la gendarmerie.

PASSÉE DANS LA
CLANDESTINITÉ EN 2010

Aurore Martin était visée depuis le 13 octobre 2010
par un mandat d’arrêt européen émis par un
magistrat madrilène pour "faits de participation
à une organisation terroriste et terrorisme"
, en
l’occurrence avoir
participé en Espagne à des réunions publiques
comme membre du parti Batasuna. Autorisé en France,
Batasuna est interdit en Espagne où il est
considéré comme une organisation terroriste depuis
2003 et interdit pour ses liens présumés avec le
groupe séparatiste basque ETA.

Aurore Martin était passée dans la
clandestinité en décembre 2010 mais était
réapparue depuis en public pendant des manifestations au
Pays basque français. La Cour européenne des droits
de l’homme à Strasbourg avait rejeté en mai un
recours de la militante contre le mandat d’arrêt émis
par Madrid.

Lire
 : Visée
par un mandat d’arrêt européen, la militante
basque Aurore Martin sort de la clandestinité

L’ETA, groupe armé
classé organisation terroriste par l’Union
européenne
et les Etats-Unis, a annoncé le 20
octobre 2011 qu’il renonçait à la violence,
après plus de 40 ans de lutte armée
pour l’indépendance du Pays basque et de la Navarre. Mais
l’Espagne comme la France exigent le démantèlement
complet de son arsenal et sa dissolution sans conditions, ce
à quoi l’ETA se refuse toujours.

UNE "SITUATION UBUESQUE"

Après son interpellation, plusieurs élus de gauche
et de droite ont manifesté jeudi leur
incompréhension. "Cette situation est ubuesque,
incompréhensible en plein processus de paix"
, a
déclaré Kotte Ecenarro
(PS), vice-président du conseil général des
Pyrénées-Atlantiques, évoquant le renoncement
à la lutte armée par l’ETA depuis un an. "Ça
tourne à la provocation de la part des gouvernements
français et espagnol"
, a-t-il ajouté.

L’élu, de même que l’adjointe écologiste au
maire de Bayonne, Martine Bisauta,
a considéré que le ministre de l’intérieur Manuel Valls
avait donné le ton, dès lundi, lorsqu’il a promis de mener
une politique de "fermeté" contre l’ETA tant
que le mouvement indépendantiste n’aurait pas
déposé les armes
. "Le décor a
été planté les jours
précédents, ce n’est pas un hasard"
, a
déclaré Mme Bisauta : "C’est
dramatique
[...]. C’est une prise de risque qui
pourrait créer des conditions de violence."
L’association
humanitaire pour les réfugiés basques Anai Artea est
allée jusqu’à qualifier
d’"acte minable" et de "provocation"
le fait de livrer
Aurore Martin à Madrid de la part d’un "ministre
de l’intérieur qui ne sait plus s’il roule pour Paris ou Madrid"
.

"QUE CHERCHE MANUEL VALLS ?"

"Ce que Guéant", ministre de
l’intérieur de Nicolas Sarkozy,
"n’avait pas osé faire,
le ministre Valls vient de le commettre.
Quelle honte !"
, s’indigne dans un communiqué
Olivier Dartigolles, porte-parole du PCF des
Pyrénées-Atlantiques. "Le gouvernement
Ayrault vient d’écrire une page déshonorante
pour notre pays"
, fustige le conseiller municipal à Pau,
jugeant "insupportable et indigne" qu’une
ressortissante française, "militante d’un parti
autorisé en France, soit extradée pour des faits
(...) non punissables dans notre pays"
. "Les
parlementaires communistes interpelleront le gouvernement pour
connaître les conditions réelles de l’arrestation
et de l’extradition"
d’Aurore Martin,
prévient-il.

Dans un communiqué intitulé "Que cherche Manuel
Valls ?", EELV Pays basque s’est
dit "choqué par l’attitude" du ministre
"concernant le Pays basque et s’inquiète de voir pratiquer une
répression que rien ne justifie dans le climat actuel"
. "Alors
que les élus de tous bords (...) et la
société civile s’allient à la fois pour travailler à l’avenir du territoire et pour rendre pérenne la paix
rendue possible par le dépôt des armes de ETA, M.
Valls semble vouloir
créer la discorde en entretenant sciemment l’amalgame
et la confusion"
, selon le communiqué.

"C’EST UN MAUVAIS SIGNE POUR LA PAIX"

Le député européen et écologiste José
Bové
, s’est dit opposé
l’application du mandat d’arrêt européen, danger
pour le processus de paix"
.
De son
côté, le sénateur MoDem Jean-Jacques
Lasserre
s’est dit "choqué de voir
de quelle façon ce gouvernement utilise des
méthodes extrêmement brutales pour traiter des problèmes
délicats"
.

La députée PS des
Pyrénées-Atlantiques Colette
Capdevielle
a pour sa part tenu à souligner que "le délit
qui est reproché n’existe pas dans le droit pénal
français"
, et que le mandat a été
appliqué alors que "des choses importantes se sont
passées"
, évoquant aussi "le processus
de paix"
. "C’est un mauvais signe pour la paix, a
réagi, du côté de l’UMP, Max Brisson.
La société civile du Pays basque et bon nombre
d’élus ont dit combien ils pensaient que ce mandat
d’arrêt était disproportionné par rapport
aux faits reprochés à Aurore Martin."
"Nous
exigeons la libération d’Aurore Martin"
, a enfin
déclaré Xabi Larralde,
porte-parole de Batasuna, y voyant "la main de Valls" et
estimant qu’il s’agissait d’une mesure à la fois "irresponsable"
et "inacceptable".

Cette soudaine montée d’adrénaline au Pays basque
un an après que l’ETA a annoncé la fin
définitive de la lutte armée devrait être
illustrée le 10 novembre lors d’une manifestation à
Bayonne en faveur du respect des droits des prisonniers et des
réfugiés politiques basques. De nombreuses
organisations politiques, syndicales et associatives ont
appelé à y participer.



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Aurore Martin sera-t-elle livrée pour ses idées ?
Matthieu Bonduelle & Patrick Henriot | lemonde.fr | 15 juin 2011

Pour des faits que la loi française ne punit pas, une citoyenne française est sous le coup, depuis plus de six mois, d’une arrestation, d’une incarcération et d’une remise par la France aux autorités judiciaires d’un pays où elle encourt douze ans d’emprisonnement. Elle a déjà été détenue pendant huit jours à la maison d’arrêt de Toulouse-Seysses, avant d’être placée sous contrôle judiciaire. Judiciairement, son sort paraît scellé : la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Pau puis la Cour de cassation ont validé le mandat d’arrêt européen dont elle fait l’objet...

Aurore Martin a décidé de "se cacher".
Qu’a-t-elle fait au juste ? Dans le mandat qu’il a
délivré à son encontre le 13 octobre 2010,
un magistrat espagnol vise sa participation, en 2006 et 2007,
à six réunions publiques – quatre en Espagne, deux en France – et la
rédaction d’un article dans le journal Gara en tant que
membre du parti indépendantiste basque Batasuna. S’y
ajoutent ses relations avec le Parti
communiste
des terres basques (Ehak).

Ce juge a retenu la qualification de "participation
à une organisation terroriste"
, car Batasuna est
illégal en Espagne depuis 2003 et Ehak depuis 2008 (soit
postérieurement aux "faits"...) et ce, en raison de leurs
liens supposés avec ETA. En France, une telle
activité, qui relève du militantisme politique, est bien entendu
parfaitement licite ; Batasuna présente d’ailleurs
des candidats aux élections locales.

Et il n’y a strictement rien d’autre dans le dossier : ni
arme, ni contact avec ETA, ni appel à la violence, ni
quoi que ce soit pouvant entrer
dans la définition française – pourtant
très large – du terrorisme. Uniquement ces
réunions, cet article, cet engagement, au grand jour.
Pourtant, la justice
hexagonale a entériné la demande espagnole au titre des quatre réunions
publiques auxquelles Aurore Martin
a participé de l’autre côté des
Pyrénées... Comment cette situation, aussi absurde
qu’inique, a-t-elle été rendue possible ?

Il ne nous appartient pas de porter
un jugement sur la cause indépendantiste, ni de comparer les justices espagnole et
française, aucune n’ayant de leçons à donner à l’autre. Ce qui
est ici en jeu, c’est l’abandon par un Etat de ses principes les
plus essentiels – et accessoirement de ses citoyens – au nom des
nécessités de la coopération avec d’autres
Etats.

L’idée générale ayant
présidé à la création, en 2002, du
mandat d’arrêt européen (MAE) était de mieux
lutter contre la
criminalité transfrontalière en supprimant les
procédures d’extradition entre Etats membres de l’Union européenne (UE), au
profit d’un contrôle exclusivement juridictionnel de la
validité des mandats. La logique de confiance mutuelle
qui devait prévaloir allait jusqu’à permettre la "remise" par un Etat
de ses propres nationaux.

A priori, rien de scandaleux. On pouvait même y voir un moyen efficace de contrer le crime organisé,
la corruption, le blanchiment... Dans la droite ligne de l’Appel de Genève
et du Manifeste de
Strasbourg
signés en 1996 et 2000 par des
magistrats de plusieurs pays. Autre avantage apparent :
alors que l’extradition était soumise à
l’arbitraire de l’exécutif, le MAE devait être
examiné par des juges indépendants.

Très vite cependant, la manière dont les
gouvernements de l’UE ont conçu le MAE s’est
révélée totalement biaisée, dans la
mesure où l’invention de ce nouvel outil coercitif ne
s’est pas accompagnée de ce qui en était le
corollaire indispensable : la constitution d’un véritable
espace judiciaire européen, impliquant un corpus
juris
d’incriminations communes, un parquet
européen, des garanties élevées et
partagées de protection des droits et libertés.
Pire, une longue liste d’infractions a été
d’emblée exclue du principe de "la double incrimination
des faits reprochés", selon lequel les faits visés
dans le mandat doivent être sanctionnés tant dans
le pays requis que dans le pays d’émission.

Comme par hasard, il en va notamment ainsi du terrorisme,
qualification pourtant éminemment politique et variable.
Cette dérogation, qui figure à l’article 695-23 du
Code de procédure pénale, recèle un grave
abandon de souveraineté et transforme le juge en
alibi : dès lors que l’Etat d’émission du MAE
a qualifié tel ou tel acte (n’importe lequel !) de "terroriste",
les magistrats de l’Etat d’exécution ne peuvent pas
vérifier s’il s’agit bien de terrorisme au regard de leur
propre loi.

Ils peuvent donc être conduits à autoriser cet Etat à livrer une personne, y compris
l’un de ses ressortissants, pour des faits qu’il ne saurait
lui-même réprimer dès lors qu’ils
relèvent, par exemple, de la liberté d’opinion et
d’expression. A charge de revanche bien sûr ! Ou
comment les Etats de l’UE ont érigé le reniement
de leurs lois en échange de mauvais
procédés...

Ainsi conçu, le mandat d’arrêt européen
devient une dangereuse hérésie. Il est d’autant
plus urgent de le dénoncer que la jurisprudence s’est
soudainement durcie : la Cour de cassation considère
désormais que la possibilité prévue par la
loi de s’opposer à
l’exécution d’un MAE "si les faits pour lesquels il
a été émis ont été commis,
en tout ou partie, sur le territoire français"

doit être écartée lorsque les faits n’ont
pas tous été commis en France...

Aurore Martin devrait jouir
partout, en France ou ailleurs, de la liberté d’opinion
et d’expression, qui constitue l’un des biens les plus
précieux des démocraties. Si, en l’occurrence,
l’Etat espagnol a choisi d’en restreindre
l’usage bien davantage que l’Etat français, il n’en
demeure pas moins qu’Aurore Martin n’a pas enfreint la loi
française : elle devrait donc pouvoir vivre et s’exprimer librement en France.





Voir en ligne : Les questions que pose l’arrestation d’Aurore Martin

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