Le Guatemala prône la légalisation des drogues pour affaiblir les cartels

Le Guatemala prône la légalisation des drogues pour affaiblir les cartels
| lemonde.fr | dimanche 19 février 2012

Légaliser les drogues pour enrayer la spirale de
violence qui ensanglante l’Amérique centrale : le
général de réserve Otto Pérez, élu président du
Guatemala en novembre 2011, a créé la surprise en
reprenant cette proposition à son compte début
février. Cet homme de droite, fondateur du Parti
patriote, avait promis tout au long de sa
campagne d’employer une "main de fer" (mano dura)
contre les criminels, souvent impliqués dans le
narcotrafic. Ils ont fait du Guatemala un des
pays les plus violents du monde, avec une moyenne
de 18 assassinats par jour et un taux d’homicides
de 46 pour 100 000 habitants, trois fois plus
qu’au Mexique voisin.

"Cette proposition doit être étudiée au niveau
régional, depuis l’Amérique du Sud, où se
trouvent les pays producteurs de drogue,
jusqu’aux pays consommateurs, incluant les
Etats-Unis, en passant par les pays
centraméricains où elle est transportée", a
estimé le président guatémaltèque, qui recevait,
lundi 13 février, son homologue salvadorien,
Mauricio Funes.

Deux jours plus tôt, le président Pérez avait
lancé sa proposition, expliquant que "les coûts
astronomiques de la lutte contre le narcotrafic
n’avaient pas permis d’éradiquer le problème".
"Avec toute la technologie et les millions de
dollars donnés par les Etats-Unis, le problème
n’a pas diminué", a constaté M. Pérez. Il a
annoncé son intention de présenter son initiative
au prochain sommet des chefs d’Etat de la région,
qui doit avoir lieu en mars au Salvador.

Le président Funes, de gauche, s’est dit ouvert à
cette proposition et "disposé à en promouvoir la
discussion, notamment à l’Assemblée (nationale
salvadorienne) ". "Il faut en discuter car la
dépénalisation peut être un coup dur aux
portefeuilles des groupes criminels", a estimé le
président salvadorien, tout en mettant en garde
contre le risque de "stimuler la consommation"
dans la région.

Les Etats-Unis n’ont pas tardé à s’opposer à
l’initiative guatémaltèque. "Notre problème
partagé de la drogue est une grande menace à la
santé publique et à la sécurité, a argumenté
l’ambassade américaine au Guatemala dans un
communiqué. Les organisations criminelles
transnationales et les gangs continueraient leurs
activités illicites telles que la traite d’êtres
humains, le trafic d’armes, l’extorsion, le
kidnapping et le blanchiment d’argent, si les
drogues illégales étaient dépénalisées demain en
Amérique centrale." Le général Pérez a déploré
cette réaction "prématurée" alors que "les
Etats-Unis devraient être ouverts à la discussion
sur ce sujet".

Avec le Honduras et le Salvador, le Guatemala est
devenu l’un des principaux points de passage et
de stockage de la cocaïne sud-américaine convoyée
par les cartels mexicains à destination du marché
nord-américain. Depuis cinq ans, les redoutables
Zetas et autres cartels de la drogue ont pris le
contrôle de plusieurs régions dans la zone
frontalière avec le Mexique.

La violence et l’insécurité coûtent 1,3 milliard
de dollars (0,98 milliard d’euros) par an à
l’Amérique centrale, selon un récent rapport de
la Banque mondiale. Une somme dont les pays de la
région auraient un urgent besoin pour lutter
contre la pauvreté, qui touche plus de la moitié
de la population.
Jean-Michel Caroit
Article paru dans l’édition du 19.02.12

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Transmis par Anne & Ahmid
Sun, 19 Feb 2012 08:45:16 -0800