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Hadopi, un bilan accablant

| nikopik.com | mardi 31 janvier 2012

mardi 7 février 2012



Déjà que la Hadopi est constamment critiquée à chaque annonce d’une nouvelle actualité la concernant, démontrant la totale incompréhension qu’elle peut avoir de l’avis des internautes et d’experts objectifs, le fait de regarder dans le passé la suite d’évènements qui a conduit à sa création, ses énormes échecs et ses prises de position passées conduit à un bilan accablant pour cette autorité.

Entre manipulations, mensonges éhontés, volonté de contourner la justice française et l’avis des Français, dépenses excessives, résultats nuls… il est vraiment difficile, même en restant objectif, de pouvoir trouver la moindre qualité à cette organisation censée favoriser la culture sur le Net.

Voici un résumé de ce qu’a réalisé Hadopi depuis sa création il y a plusieurs années jusqu’aux dernières actualités récentes, démontrant sa parfaite inutilité.

La volonté du président de la République

Automne 2007, le président de la République Française Nicolas Sarkozy surfe encore sur une vague de popularité importante et peut compter sur le soutien de nombreux médias grand public pour lancer ses réformes.

L’un des grands chantiers du nouveau président au pouvoir ? La mise au pas du téléchargement illégal, avec de très nombreux internautes (pas pour autant technophiles) qui narguent les autorités depuis l’avènement du MP3 et du DivX sans risquer le moindre ennui, puisqu’il n’y a pas de moyens mis en place pour contrôler les échanges qui transitent sur la toile.

Le dossier est alors confié à Denis Olivennes, patron du Nouvel Observateur et de la FNAC, et surtout farouche opposant aux échanges en ligne, propice à faire baisser le chiffre d’affaire de ses enseignes.

L’absence de véritable concertation avec les principaux intéressés, les clients, conduit à une décision importante et que beaucoup considéreront comme injuste dans l’avenir : il faut opposer les acteurs de la culture luttant avec effort contre une jeunesse égoïste coupable de « vol organisé » (ce sont les propres mots de Nicolas Sarkozy).

Il est donc décidé que la solution pour lutter contre le téléchargement sera la riposte graduée…

La riposte graduée

La riposte graduée consiste à couper pendant un an, après plusieurs avertissements, l’accès à Internet aux internautes reconnus coupables de téléchargements illégaux.

Pour cela, le dispositif flashera les adresses IP des internautes pris en flagrant délit de téléchargement, et enverra automatiquement un avertissement, puis une coupure doublée d’une amende, sans devoir passer par un juge. Nous sommes donc présumés coupables, à nous de prouver notre innocence (encore que, il n’était pas prévu aux particuliers de pouvoir contester aux débuts de la définition du projet de loi).

Pas de grosses résistances à ce moment-là du côté des industriels puisqu’il n’y aura, semble-t-il, pas d’effort particulier à fournir pour répondre à cette demande et que les internautes se voyant coupés d’accès devront tout de même s’acquitter de leur abonnement auprès de leur fournisseur d’accès.

Christine Albanel, alors ministre de la Culture, annonce que la loi sera votée durant l’été 2008, qu’elle sera mise en application en septembre et que les premières coupures d’accès auront lieu à la fin 2008 (je vous rappelle que nous en sommes en 2012, et qu’absolument aucun internaute n’a vu son accès à Internet coupé à ce jour ^^).

La presse soutient en majorité ce projet de loi, tous les principaux acteurs aussi, il n’y a finalement que les vilains pirates qui le bouderaient ? Heureusement que non, d’autres acteurs influents vont se mêler de cette affaire.

La perte du soutien de nombreux acteurs importants

L’UFC-Que Choisir est la première à s’outrer de la mise en place de cette loi, son avis n’ayant pas du tout été pris en compte malgré des promesses de consultation de la part du gouvernement, sans compter sur le fait que le texte est une belle utopie inapplicable en France.

Puis c’est au tour de Google, Microsoft, Dailymotion, Yahoo de critiquer la riposte graduée et l’absence de consultation de ces 4 acteurs importants du Web.

Fin 2008, c’est au tour des FAI de lâcher le gouvernement en protestant contre le fait de couper à tour de bras les accès Internet de leurs clients.

En avril 2009, un énorme coup dur atteint le projet Hadopi de plein fouet : à seulement 2 jours de l’adoption du texte, de nombreux artistes français, réalisateurs, producteurs et acteurs s’expriment et rejettent le projet de loi dans « une lettre ouverte aux spectateurs citoyens » parue dans Libération.

Ce qui ressemblait au départ à un véritable conte de fées entre les artistes et l’état s’effrite : les artistes ne soutiennent pas forcément cette Hadopi, qui pourtant devrait logiquement leur apporter plus de revenus non ? Certains ont bien compris que cette loi serait votée pour favoriser les fameux majors de l’industrie du disque et du cinéma, et que cela n’apporterait pas plus d’argent aux artistes.

Si jusqu’à présent, le Parti Socialiste craignait de perdre des voix dans le monde de la culture, une fronde est rapidement organisée pour faire en sorte qu’une majorité de députés de gauche soit présente le jour du vote de la Hadopi. Cette fronde parvient à bloquer le texte.

Il s’agit alors d’un des premiers gros échecs du gouvernement Sarkozy, qui n’avait jusque-là pas rencontré de franches résistances à ses projets grâce au soutien de nombreux médias et à la confiance d’une majorité des Français. Effet inattendu : le projet de loi qui se voulait voté dans la plus grande discrétion (un peu comme l’ACTA de nos jours) se voit propulsé à la une des grands quotidiens et des journaux.

Et ce ne sont plus seulement quelques experts passionnés avec un public réduit qui vont s’exprimer sur le sujet, mais de nombreux journalistes qui vont alors pointer du doigt les lacunes énormes du projet de loi.

Il apparaît d’ailleurs au grand jour que les organismes chargés d’évaluer le projet de loi se sont eux aussi révélés contre la Hadopi et n’ont pas manqué de critiquer fortement le texte. Parmi eux : l’Arcep (Autorité de Régulation des Communications Électroniques et des Postes), la CNIL (Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés) et le Conseil d’État.

Bilan : retrait du soutien de l’intégralité du monde politique français, retrait du soutien de l’intégralité du monde des artistes et médiatisation du projet de loi.

Il devient alors bien plus délicat de satisfaire tout le monde dans ce contexte…

Pressions de la part du gouvernement sur l’Assemblée et les médias pour faire adopter la loi Hadopi

Malgré le rejet du projet de loi, le gouvernement va tenter une chose qui n’avait encore jamais été vue durant la Ve république : le retour du texte de loi sous un nouveau nom, « Internet et création » remplaçant « Création et Internet » afin de le faire voter en dépit du rejet du texte par l’Assemblée. Cela a fonctionné puisque cette fois-ci la majorité politique ne s’est pas laissée avoir par la gauche comme lors du premier vote.

S’il est déjà effarant de constater que le gouvernement n’hésite pas à outrepasser les institutions et procédures mises en place pour promulguer à tout prix son projet de loi, ce qui va suivre est aussi très grave.

Frédéric Taddeï, alors présentateur de l’émission Ce soir ou jamais, a choisi de donner la parole à des personnes contre Hadopi sur une chaîne de grande écoute.

Il lui a fallu pour cela lutter contre la pression du Ministère de la Culture qui souhaitait que l’émission ne soit pas diffusée. Devant le refus de l’animateur, Albanel a tenté d’imposer la venue d’autres invités, sans succès.

Il y a eu le même genre de pressions sur Christophe Hondelatte, animateur à RTL, qui se voit censurer 5 invités successifs.

Les Inrockuptibles préparent au même moment une couverture avec Catherine Deneuve et Christophe Honoré, deux des signataires de la fronde des artistes contre Hadopi, ainsi qu’un grand débat autour du projet de loi. Ce projet d’article et de couverture ne sera finalement pas retenu (choix de la rédaction ou pressions externes ?).

Le fait le plus grave restera sûrement le licenciement du responsable du pôle Web de TF1, viré par sa direction pour avoir exprimé son opinion contre Hadopi dans un email à sa députée, qui a retransmis ledit mail au cabinet du Ministère de la Culture, qui l’a renvoyé à son tour au service juridique de la chaîne privée…

Visiblement il est difficile de critiquer publiquement la Hadopi si on peut être en position d’être écouté sans subir de pression de la part du gouvernement…

Vote de la loi… et censure

En mai 2009, la loi Hadopi arrive enfin à être votée en dépit de son histoire mouvementée. Une victoire de courte durée pour Albanel, car le Conseil constitutionnel censure sévèrement Hadopi, et empêche son application effective.

Il déclarera notamment que le principe d’Hadopi est contraire aux valeurs fondamentales de la République, et que le dispositif est clairement disproportionné (surveillance de tous les internautes) par rapport au but recherché (limiter le téléchargement illégal).

Le principal reproche fait à l’Hadopi est la présomption de culpabilité, en flagrante contradiction avec le droit français.

En effet avec la Hadopi 1, vous deviez prouver votre innocence dans une affaire de téléchargement illégal si votre adresse IP se retrouvait flashée par le dispositif mis en place par une entreprise privée financée par des industriels de la musique et du cinéma et que vous vouliez contester cet état de fait.

Les membres de la Hadopi avaient alors mentionné la création d’un mouchard (pas forcément gratuit) contrôlant les activités des internautes sur leur propre ordinateur, afin de prouver votre innocence oO.

Impossible de justifier une telle atteinte à la vie privée seulement pour protéger les intérêts des industriels de la culture…

Une énorme baffe pour la Hadopi qui n’avait pas vraiment prévu cela puisque les débats jusqu’à présent portaient surtout sur l’intérêt des artistes à soutenir ou non le dispositif.

Afin de contourner le camouflet infligé par le Conseil constitutionnel, une mise à jour de la loi est votée.

Une Hadopi 2 censée contourner les écueils… sans succès

Cette dernière ne sanctionnera plus le téléchargement illégal, mais le défaut de protection de votre accès Internet s’il est utilisé pour des actions frauduleuses.

Quand on voit qu’il est possible aujourd’hui de pirater un accès Wifi depuis son ordinateur en installant quelques logiciels gratuits, et même depuis son téléphone portable, on voit bien encore une fois que ce soi-disant défaut de sécurisation de la ligne est impossible à garantir pour qui que ce soit. Même des spécialistes en sécurité informatique voient des informations se faire voler sur leur réseau, comment voulez-vous qu’une mamie du Cantal puisse sécuriser sa connexion ?

Quelques patchs seront aussi ajoutés pour contourner l’obligation de devoir passer par un juge pour émettre des sanctions, sans succès…

Bilan accablant d’Hadopi

À la vue de cet historique chargé, que pouvons-nous conclure sur cette Hadopi ?

Elle est inefficace

Il a été prouvé que les échanges de fichiers déclarés comme étant illégaux n’ont pas baissé. Les flux P2P, surveillés par l’entreprise TMG mandatée par Hadopi, ont bien diminué, mais la majorité des internautes français se sont naturellement portés vers d’autres solutions comme le téléchargement direct, non surveillé.

De plus, il est très facile de se soustraire à la surveillance d’Hadopi sans pour autant avoir de grandes connaissances en informatique, preuve que le procédé mis en place est de toute façon obsolète.

Elle est incompétente et hypocrite

En effet, il apparaît clairement qu’Hadopi n’est pas qualifiée pour remplir sa mission, puisqu’elle n’est pas capable elle-même de respecter la propriété intellectuelle.

Par exemple le premier logo qu’elle a utilisé a été créé avec une police de caractère appartenant exclusivement à France Télécom et n’ayant jamais été publiée publiquement.

Son usage était une violation directe de la propriété intellectuelle du créateur de la police, ce qui fait mauvais genre pour une autorité censée représenter les droits d’auteur sur Internet…

De plus, les photographes professionnels accusent Hadopi de viol du droit de la propriété intellectuelle à propos des images utilisées sur le site Web Hadopi.

Quant au parti politique qui soutient la Hadopi avec force, ils se sont fait prendre de nombreuses fois à transgresser le droit d’auteur ^^

Jean-François Copé (président du groupe UMP à l’Assemblée) viole le droit d’auteur

Les jeunes Pop et le lipdub avec chanson piratée

Frédéric Lefebvre (secrétaire d’État UMP) qui ne respecte pas le droit d’auteur des articles publiés sur Internet

Le non-paiement des droits nécessaire pour la diffusion d’un morceau de musique lors de plusieurs meetings, et l’oubli total de demander l’autorisation de diffusion au groupe

Le service presse de l’Élysée qui a réalisé plus de 400 copies d’un DVD documentaire sur Nicolas Sarkozy, en supprimant au passage le nom de la société de production

L’Élysée flashé par les internautes pour téléchargement illégal, puis le Ministère de la Culture qui a son tour se fait repérer sur BitTorrent

Prôner le respect des droits d’auteur en les violant soi-même, voilà une bien étrange manière d’être pris au sérieux…

J’ajoute la définition de l’incompétence :
Dans le langage ordinaire, il se dit du manque de connaissances suffisantes pour juger de quelque chose, pour en parler.
Et de l’hypocrisie :
Vice consistant à s’attribuer une vertu, une piété ou un sentiment noble que l’on n’a pas ou que l’on ne respecte pas,
qui me permettent bien de justifier mes propos, et non pas de faire de la diffamation O :-)

Elle est excessivement chère

Plus de 10 millions d’euros de budget en 2010, les 13 millions dépassés en 2011… Rappelons qu’il n’y avait pas plus de 43 personnes qui y travaillaient lorsque ces chiffres ont été publiés, ce qui nous fait une moyenne de plus de 300 000 € dépensés en un an par employé.

Pas mal pour une machine à envoyer des spams non ?

Jean-Marc Manach, journaliste chez Owni, soulignait d’ailleurs que la CNIL, organisme chargé de protéger nos intérêts, avait mis plus de 30 ans à obtenir un budget de 13 millions d’euros pour fonctionner, la Hadopi n’aura pas mis un an…

Quand on nous parle sans cesse de crise économique et que l’on s’en sert comme excuse pour sabrer de nombreux avantages sociaux, il serait peut-être bon de se pencher sur les finances de cet organisme excessivement dépensier vous ne trouvez pas ?

Elle ne pourra jamais sanctionner un internaute

Nous sommes en 2012 et toujours aucun dossier n’a été transmis au parquet en ce qui concerne des internautes ayant potentiellement piraté des oeuvres sur Internet.

Pourquoi cela ? Car il suffira de répondre devant le parquet comme l’a fait l’Élysée il y a quelque temps :

« L’Élysée dément qu’un de ses collaborateurs ait pu se livrer à de telles pratiques, expliquant que les adresses IP ne sont pas fiables car elles peuvent être piratées. »

Et cela fonctionnera, puisque ça va être à Hadopi de prouver devant la justice que les personnes sont coupables, et non pas aux internautes de prouver leur innocence. Une simple déclaration comme celle-ci suffit !

Le Conseil supérieur de la magistrature ne laissera jamais un internaute être condamné sans obtenir des preuves solides de son effective culpabilité, ce que la Hadopi aura bien du mal à prouver avec ses listings TMG, ne démontrant en aucune façon que la ligne de l’internaute n’a pu être détournée.

C’est pour cela qu’Hadopi n’est pas pressée d’amener devant le parquet les dossiers des internautes flashés 4 fois par son dispositif : l’intégralité du coûteux système qui maintient sous perfusion ses membres, TMG et quelques autres acteurs s’effondrera, et l’inutilité d’Hadopi sera prouvée officiellement.

Elle n’est pas égalitaire

Les personnes possédant suffisamment de compétences en informatique n’ont jamais été vraiment inquiétées personnellement par Hadopi, ce qui contribue à creuser la fracture numérique qui peut exister actuellement.

Une bonne excuse pour la Hadopi qui, au nom du rétablissement de l’égalité des Français, a encore proposé il y a peu de mettre en place des mouchards dans les ordinateurs des Français, afin que chacun se trouve sur le même pied d’égalité (oui ils sont vraiment sérieux quand ils font de telles propositions…).

Mais surtout, ce ne sont pas tous les fournisseurs d’accès qui ont signé avec Hadopi un engagement pour vous balancer en cas de détection de votre adresse IP.

Ainsi si vous êtes chez les 5 poids lourds des FAI en France que sont Orange, SFR, Bouygues, Numéricable et Free, votre opérateur est forcé de vous dénoncer en cas de demande de la part d’Hadopi. Mais si vous êtes chez Nerim, Volcane, FDN, OVH ou même chez Colt (fournisseur d’accès de nombreuses administrations françaises) ou chez un des fournisseurs locaux à Internet, vous ne risquez rien ;-)

La loi ne semble donc pas s’appliquer à tout le monde.

Elle ne protège pas les intérêts des artistes du monde de la musique

Hadopi ne devait-elle pas défendre la culture contre les vilains jeunes volant sans vergogne le pain dans la bouche des artistes ? La réalité est toute autre !

Les ventes de CD ont fortement baissé, celles de la musique numérique vendue en ligne ont augmenté, ainsi que les diffusions en streaming via des sites comme Deezer ou sur des Webradios. Sites qui paient grassement les majors pour avoir le droit de continuer à diffuser. Que touche un artiste sur les ventes de musique numérique et sur la diffusion en streaming de ses morceaux ? Absolument rien !

Oui, vous avez bien lu : un artiste ne touche pas un seul euro sur les revenus provenant de la vente de musique en ligne et sur les redevances perçues pour le streaming, seules les majors ramassent les bénéfices sans les redistribuer.

Une situation véritablement hallucinante et impossible à justifier pour la Hadopi et les majors, mais qui perdure depuis l’avènement de la musique en ligne. Et ce n’est pas un gus dans un garage qui émet cette information, mais le président de la Spedidam, la société de perception des artistes, qui accable de ce fait Hadopi et l’absence de défense des artistes qui se font flouer (pour ne pas dire autre chose) au grand jour.

L’industrie du cinéma n’est pas en crise

La mise en place de la lutte contre le téléchargement illégal a été mise en place dans l’urgence, soit disant pour sauver la culture victime de la baisse des ventes dans le monde de la musique et du cinéma.

Attendez une minute, le cinéma serait moribond en France ? Alors que nous sommes en pleine crise économique, que les Français font des économies sur quasiment chaque poste de dépense, le cinéma ne s’est jamais aussi bien porté que durant ces dernières années !

Comme on le voit sur ce graphique provenant du journal Libération, la baisse de la fréquentation a été très forte entre 1982 et 1992 (Internet était encore loin d’arriver dans le foyer de la majorité des Français, mais où les magnétoscopes et les cassettes VHS s’implantaient largement) puis le nombre d’entrées par an s’est envolé depuis 1992 jusqu’à frôler le record des années 60.

Effet Hadopi ? Bien sûr que non, on ne voit aucun changement notable dans la hausse de cette courbe. Le crédit de cette augmentation de fréquentation serait plutôt à mettre au profit des cartes illimitées, permettant pour le coût d’un abonnement mensuel de profiter de tous les films de votre choix. Une idée géniale pour les majors du cinéma : un film d’une qualité moyenne est assuré de remplir suffisamment les salles, bien qu’il n’attirerait pas forcément les foules si les gens devaient payer au prix fort chaque entrée.

La concurrence était pourtant forte ! Car les dépenses des ménages en ce qui concerne la télévision payante et la VOD ont considérablement augmenté sans pour autant égratigner les ventes de billets dans les salles obscures.

Il n’y a finalement que le marché de la vente de supports physiques (DVD et Blu-Ray) qui a rencontré pour la première fois une baisse (-6% en valeur entre 2010 et 2011) après une croissance ininterrompue durant les dernières années, ce que l’on peut facilement expliquer par l’accroissement des dépenses des ménages dans les abonnements de télévision, la location de films numériques sur leur TV ou ordinateur, la hausse des dépenses dans les salles de cinéma, et aussi, il faut bien l’avouer, par le piratage des films.

Tout comme pour le monde de la musique, la vente de supports physiques dans le domaine du cinéma devrait diminuer durant les prochaines années… mais il ne faudrait pas oublier que les majors s’y retrouvent dans les autres postes de dépenses déjà cités précédemment.

Difficile de plaindre cette industrie florissante et de justifier la surveillance de tous les Français pour protéger leurs revenus en très bonne santé ^^

Le futur d’Hadopi

Avec un bilan aussi accablant, comment la Haute Autorité pour la Diffusion des Oeuvres et de la Protection des Droits sur Internet va-t-elle évoluer ? Il semble malheureusement qu’elle continuera à oeuvrer après les élections présidentielles en France car les deux partis majoritaires, l’UMP et le PS, projettent tous deux de la conserver, en promettant maintes réformes censées la rendre plus performante. Pour le moment, on voit encore mal comment…

Un autre problème se profile à l’horizon : le président Nicolas Sarkozy s’est déclaré prêt à instaurer une nouvelle loi Hadopi 3 pour lutter contre les téléchargements directs et le streaming.

TMG, l’entreprise mandatée par Hadopi, s’est à son tour déclarée prête à collecter les adresses IP des internautes pratiquant les téléchargements directs et le streaming, sans pour autant expliquer comment ils vont faire pour effectuer cette collecte.

Il n’y a pourtant pas 36 solutions pour cela :

- Soit une surveillance totale de ce qui transite par les réseaux va être mise en place en utilisant le DPI, technologie aussi utilisée en Tunisie durant la dictature, ainsi qu’en Iran et en Chine pour surveiller les moindres faits et gestes de la part des internautes.

- Soit un filtrage total de ce qui transite via les réseaux Internet en France, encore une fois comme ce qui se fait en Chine à l’heure actuelle.

- Soit la mise en place d’un mouchard obligatoire sur les box des opérateurs ou les ordinateurs de chacun.

Les 2 premières solutions iront à l’encontre du droit européen, la dernière fera hurler à juste titre tous les défenseurs des libertés individuelles et des droits fondamentaux, et sera de toute façon très vite contournée techniquement.

Pourquoi une telle volonté d’imposer à tout prix la surveillance des réseaux ?

De plus en plus de personnes pensent que la simple défense des intérêts des industriels de la culture n’est pas le seul enjeu, mais que la démocratie de demain se fera sur Internet. Si jusqu’à présent il était facile de contrôler les médias grand public comme la télévision, la radio ou les journaux, comme on a pu le voir plus haut, les informations qui transitent via Internet sont bien plus difficilement maîtrisables. D’où la nécessité de contrôler au possible les échanges qui ont lieu sur les autoroutes de l’information.

Parano ? Peut-être… Sauf que déjà 2 députés ont demandé à 2 reprises dans une question adressée à l’Assemblée nationale ce qu’Hadopi pourrait faire pour endiguer « les dérives sur les réseaux sociaux ». Quitte à confier des missions de surveillance d’envergure bien plus importante à cette fameuse Hadopi, avec à la clé des sanctions automatisées comme le rêve depuis des années la majorité au pouvoir.

Principale source




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Transmis par Gérard Valler
Tue, 07 Feb 2012 13:28:41 +0100




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