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Un Squale à l’Elysée

Olivier Cabanel | agoravox.fr | mercredi 25 janvier 2012

mercredi 25 janvier 2012

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La technologie aidant, notre vie privée se réduit comme peau de chagrin, et aujourd’hui, personne n’est à l’abri de l’espionnage : comment s’étonner dès lors que les services de l’état s’en privent.


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En 2012, On est très loin des pigeons caméra, du rouge à lèvre pistolet, des chaussures à semelle amovible, et autres parapluies bulgares, car grâce aux nouvelles technologies, d’énormes progrès ont été réalisés, pouvant mettre à mal nos libertés et notre vie privée. lien

Aujourd’hui, un satellite peut voir une aiguille dans une meule de foin, un micro peut capter à plusieurs dizaines de mètres de distance, même à travers un épais mur, une conversation intime, et grâce aux mobiles, et autres i-phone, le moindre de nos déplacements peut être observé.

Avec un micro mural, vous pouvez écouter discrètement une conversation qui se tient dans une pièce voisine, même à travers 20 cm de béton, (lien) et dans votre entreprise, il est possible à votre patron d’espionner clandestinement tout ce que vous faites sur l’ordinateur de votre bureau, s’il s’est muni auparavant d’un logiciel espion. lien

Mais l’espionnage n’est pas le seul apanage des dirigeants de tout poil puisqu’aujourd’hui le consommateur peut s’équiper pour quelques euros d’un stylo, d’une montre, d’une clef USB et de divers gadgets miniatures capables d’enregistrer, de filmer une conversation censée rester intime (lien) mais aussi, dans l’autre sens, de détecteur de micros (lien) voire de détecteur (lien) et suppresseur de logiciel espions. lien

Et puis avec google earth, n’importe qui peut se rapprocher du sol, jusqu’à reconnaitre quelqu’un comme on peut le juger sur ce lien.

Voici venu aussi le temps des « insectes artificiels », comme cette libellule, appelée DelFly, de 3 petits grammes, qui filme, enregistre tout ce qu’elle survole, très discrètement. vidéo

Mais c’est dans le secret des appareils d’état que l’espionnage bat actuellement son plein, puisqu’on découvre que le chef de l’état, après avoir promis d’en finir avec les manœuvres douteuses des RG (renseignements généraux) et autre DST, à peine élu, a crée le 28 juin 2008, la DCRI (direction centrale du renseignement intérieur) en faisant fusionner les deux organismes précédents, laquelle DCRI devait signer la fin de la police politique. lien

Il met à la tête de ce FBI à la française, un vieil ami de 10 ans, ancien policier des RG, devenu préfet, Bernard Squarcini, surnommé « le Squale  » qui se définit ainsi « celui qui sait tout, et qui veut tout savoir  », à la tête d’une troupe de plus de 3600 personnes, lequel va investiguer toujours plus, s’intéressant à tout ce qui pourrait faire de l’ombre au chef de l’état. lien

Or on se souvient que «  Médiapart » avait découvert être la victime d’espionnage policier, diligenté par l’Elysée, ce qui avait provoqué une plainte de Claude Guéant, le nouveau ministre de l’Intérieur, plainte qu’il avait retiré quelques temps après. lien

Depuis, l’affaire continue de faire des vagues, puisque ce qu’on appelle aujourd’hui l’affaire des fadettes, a provoqué la mise en examen de Philippe Courroye, ce magistrat surnommé aimablement par ses confrères « courroie de transmission », suite aux rapports qu’il pourrait entretenir avec le chef de l’Etat. lien

On se souvient de la déclaration récente de Claude Guéant qui affirmait que Nicolas Sarközi n’était « concerné par aucune de ces affaires », alors que Patrick Nieto, de l’IGS (inspection générale des services) avait confirmé que « Monsieur Courroye demandait très précisément les fadettes (facturation détaillées de téléphone) concernant Jacques Follorou et Gérard Davet  » ces deux journalistes du Monde qui avait publié un article sur la perquisition menée chez Liliane Bettencourt.

On soupçonne Courroye d’avoir tout fait pour freiner les affaires Karachi, et autres Bettencourt, ce qui aurait pu mettre en difficulté le Chef de l’Etat lui-même, puisque ce dernier est suspecté d’avoir organisé le financement de la campagne d’Edouard Balladur, avec l’aide d’un autre Nicolas, Bazire, pour ne pas le nommer.

Comme l’avait écrit dans son livre Ghislaine Ottenheimer, (les deux Nicolas, la machine Balladur-éditions plon) Bazire et Sarközi sont les deux gamins les plus puissants de France, qui a 37 ans et 39 ans, contrôlent les principaux leviers de commande (Matignon, Budget, communication, nomination) et vont être les artisans de la campagne malheureuse présidentielle de Balladur. lien

A la lumière d’un article paru dans « médiapart », Yves Bertrand, l’ancien patron des RG, balance à tout va, et révèle l’existence depuis 1995 d’un système d’écoutes téléphoniques, diligentées par les services du premier ministre, sans le moindre contrôle de la CNCIS (commission nationale des interceptions de sécurité). lien

Et puis, récemment, Christophe Labbé, Olivia Recasens et Didier Hassoux, trois journalistes respectivement du «  Point » et du « Canard Enchaîné  » ont publié « l’espion du président » (édition Robert Laffont), s’intéressant de très près à Bernard Squarcini, en investiguant au cœur de la DCRI, rencontrant même des gens à l’intérieur de cette organisation, afin de vérifier la promesse sarkoziste d’en finir avec la police politique.

Obligés d’utiliser à leur tour des méthodes d’espions, dans un vrai climat de paranoïa, interviewant un magistrat dans une pièce saturée par une musique assourdissante, pour échapper aux écoutes, et protéger leurs sources, ces trois journalistes ont mené une enquête plus que fructueuse. vidéo

Ils ont découvert, entre autres, que sur une clé USB, circulait entre certains policiers du DCRI, les écoutes de Dominique Strauss Khan, bien avant que n’éclate l’affaire du Sofitel.

Ils ont dévoilé le côté trouble de Squarcini, ses relations dans les milieux marseillais, sa fréquentation des cercles de jeux, et qui se considère comme le capitaine d’un navire qui accepte sans la moindre objection les ordres de l’armateur qu’est le Chef de l’Etat. lien

Claude Guéant, toujours dans le déni, tente d’éteindre l’incendie. vidéo

Les 3 journalistes n’ont pourtant pas mis dans le même sac les 3600 hommes et leur chef, affirmant que la grande majorité de ces agents un peu spéciaux ont le sens de l’intérêt général, le sens de l’Etat, aimant leur travail, se refusant à accepter les dérives dues à l’instrumentalisation de la DCRI par Squarcini pour le compte de l’Elysée. lien

La plainte que Squarcini annonce vouloir déposer n’inquiète pas les auteurs qui affirment avoir toutes les preuves de ce qu’ils ont publié. lien

L’espionnage ne concerne pas que les personnalités dans l’opposition aujourd’hui, mais aussi les militants, et les syndicalistes comme l’explique l’avocate Marie-Laure Dufresne-Castet, dénonçant, entre autres, l’augmentation des lois policières depuis 10 ans. vidéo

Le plus grave, c’est que cette institution travaille sans le moindre contrôle juridique : les magistrats, pas plus que les journalistes, contrairement au FBI, n’y ont pas le droit d’enquêter.

On se souvient de la carrière d’Edgar Hoover, qui a dirigé pendant près de 40 ans, et d’une main de fer, le FBI, sauf que les « Attorney Generals » exerçaient un contrôle sur son activité, et que finalement, au moment du Watergate, une commission d’enquête, et une loi sur le droit à l’information permettra de constater que les fiches de renseignements du FBI étaient truffées d’erreur, et d’approximations, concluant : « on ruina des carrières, on brisa des amitiés, on souilla des réputations, on poussa à la faillite des entreprises, et dans certains cas, on mit des vies humaines en danger  ». lien

Mais revenons à l’espionnage Elyséen.

Ce n’est pas une nouveauté comme le rappelle Antoine Perraud, dans un article qui vient de paraître dans « Médiapart  », nous remettant en mémoire l’affaire Ben Barka, dans laquelle le chef de l’Etat, un certain De Gaulle n’est pas sorti grandi, pas plus que Georges Pompidou.

C’était l’époque où Maurice Papon eut du sang sur les mains, lors de la tuerie du métro Charonne, et ni Marcellin, ni Frey, ni Poniatowski, ou Grimaux n’avaient rien à lui envier.

Ils ont pourtant toujours été les uns comme les autres dans le déni d’une police parallèle, Roger Frey affirmant sans rougir : «  j’affirme solennellement-une fois pour toutes- qu’il n’y a pas de police parallèle, et qu’il faut que cessent ces calomnies odieuses, ces racontars déshonorants, ces histoires de barbouzes qui n’ont plus le mérite d’être drôle  ».

Aujourd’hui, les affaires portent d’autres noms : Pérol, Tapie, Gaubert, Hortefeux, Woerth, Lagarde, Courroye, Takieddine, Péchenard, Squarcini, et comme le dit le journaliste de « Médiapart  », cette fois ci, le Chef de l’Etat est bel et bien impliqué. lien

L’élection de 2012 portera-t-elle un coup fatal à cette police secrète ?

En tout cas, François Hollande, lors de son discours du 22 janvier 2012 à promis qu’il voulait en finir avec « l’utilisation de la police à des fins politiques  ». lien

Arrivera-t-il à ses fins ?

Nous aurons la réponse après le 6 mai 2012, mais comme dit mon vieil ami africain : «  la plupart des gens préfèrent vivre avec de vieux problèmes, qu’avec de nouvelles solutions  ».

L’image illustrant l’article provient de « facetieusehistoiredumonde.blogspot.com »

Merci à Corinne Py pour son aide efficace.

Olivier Cabanel



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