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« Nous aussi, nous irons à Valognes »

comité anti-CASTOR de Tarnac | catharsis-prod.eu | mardi 15 novembre 2011

dimanche 20 novembre 2011

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Fukushima, c’était il y a huit mois. Il n’y a pas de << retour à
la normale >> après une catastrophe nucléaire. Il y a un nouvel état du
monde, une nouvelle géographie du ravage dont l’information régnante
voudrait que l’on s’accommode, par la force des choses. Le spectacle
des explosions de Fukushima offert en live streaming à la planète

entière, les dépêches sans queue ni tête livrées d’heure en heure à
l’avidité des peuples obéissent à la même logique qui commande
aujourd’hui le plus complet silence sur les conséquences de la
catastrophe.

Qui sait que le Japon a mis à l’arrêt à ce jour 44 de ses
réacteurs, que seuls dix fonctionnent encore et qu’à Tokyo on préfère
désormais les coupures d’électricité aux merveilles de l’atome ? Qui se
soucie que 90 % des enfants naissant actuellement dans la zone

contaminée autour de Tchernobyl soient frappés de tares génétiques ? La
vie est assez dure comme ça pour s’épargner d’avoir, de surcroît,
conscience de son horreur. Les pays les plus nucléarisés sont ceux où
l’on se rebelle le moins contre le nucléaire. Les prisonniers finissent
généralement par aimer leur geôlier, pour peu qu’on les résigne assez à
leur sort.

Dans l’ambiance de fin du monde, d’apocalypse symbolique,
d’effondrement généralisé où nous baignons présentement, le nucléaire

fonctionne comme un verrou sur la situation politique. C’est un ciel
bas et lourd qui pèse comme un couvercle sur toute idée de
bouleversement. Ce qui est en jeu là, ce n’est évidemment pas la
révolution, tout juste sa possibilité. D’autant plus cette société
épuise le peu de crédit qu’il lui reste, d’autant plus le réseau de
centrales qui enserre le territoire nous fait l’effet d’un corset,
d’une camisole.

Comment un régime qui ne s’aventure plus à faire de promesse

pour l’année suivante ose-t-il produire des déchets radioactifs pour
encore cent mille ans ? Comment ignorer que la dépendance énergétique
où l’on nous tient, et la sorte de chantage qui l’accompagne, réduisent
à l’insignifiant toutes nos prétentions à la liberté ? Il y a quelque
chose de morbide dans l’investissement libidinal dont l’Etat français a
couvert ses centrales et ses bombes à neutrons. A mesure que
gouvernements étrangers et capitalistes éclairés font savoir l’un
après l’autre leur intention de renoncer au nucléaire, la France
préfère se dire que si elle est de plus en plus seule dans son impasse,

c’est simplement qu’elle est la meilleure.

Alors que l’EPR est en bonne voie pour égaler Superphénix dans
la catégorie des folies furieuses, EDF dévoile à présent son intention
de relancer la surgénération. C’est un spectacle atterrant qu’un tel
déni du réel, une telle imperméabilité à l’expérience, une telle façon
d’exposer au monde entier ses verrues comme un titre de gloire.

Trois ans se sont écoulés depuis ce 11 novembre où la Sous-

Direction Anti-terroriste a trouvé bon d’investir le village de
Tarnac et quelques autres domiciles en France, afin d’y arrêter une
dizaine de personnes. Renseignements pris, nous avons fini par acquérir
une idée assez précise de l’étonnante convergence d’intérêts qui a
amené à ces arrestations. On arrive, selon le fil que l’on tire dans
cette bobine, à d’obscures barbouzes grenouillant dans la << sécurité >>,
à des services secrets agissant << informellement >> à l’échelle

européenne, à des conseillers du prince en veine de reconnaissance, à
de vieux fachos ayant accédé aux ministères dans le sillage de Sarkozy
et jugeant que l’heure était enfin venue de prendre leur revanche sur
les gauchistes.

On y trouve aussi les intérêts bureaucratiques bien compris
d’ex-RG mis à mal par la fusion avec la DST au sein de la DCRI et les
éternelles ambitions ministérielles de Michèle Alliot-Marie. Pour faire
bonne mesure, on n’oubliera pas le rôle joué par l’infiltré britannique

Mark Kennedy-Stone et l’effet des habituelles rivalités dont les milieux
radicaux sont, au même titre que n’importe quel autre milieu, le siège
détestable.

Mais si l’on s’en tient aux faits, et non à leur cause, ce
qui a fini par nous sauter aux yeux, c’est ceci : l’affaire de Tarnac
fut d’abord une tentative forcenée, et à ce jour réussie, pour contenir
aux frontières l’extension du mouvement anti-nucléaire allemand. Toute
l’opération aura consisté à travestir une action de blocage de trains

revendiquée par un groupe anti-nucléaire allemand et exécutée
par une méthode assez usuelle et assez sûre – les fameux << crochets >> -
pour avoir été employée jusqu’à une centaine de fois en une seule année
de l’autre côté du Rhin sans jamais blesser quiconque, en un << acte
terroriste >> immotivé visant à faire dérailler des trains. Il aura

suffi pour cela, d’un côté, d’occulter la revendication allemande
transmise dès le 9 novembre 2008 par Interpol, et de l’autre de faire
le plus de bruit possible autour de l’arrestation d’un groupe que l’on
avait depuis longtemps dans le viseur.

Comme l’assassinat de Vital Michalon lors de la manifestation
de Malville en 1977, comme les tendons tranchés volontairement, l’année
dernière, aux militants du Groupe d’Action Non-Violent Antinucléaire
(GANVA) qui s’étaient enchaînés sur la route du train de transport de

déchets ultra-radioactifs CASTOR (CAsk for Storage and Transport Of
Radioactive material), l’affaire de Tarnac témoigne de la nervosité
pathologique qui atteint l’État français dès que l’on touche à la
question nucléaire. Il est vrai qu’il a sur ce point des décennies de
mensonge et des milliers de morts à faire oublier.

Cette année que se prépare, pour la première fois peut-être,
une action de masse pour bloquer à son point de départ, le 24 novembre
prochain à Valognes (Manche), le train CASTOR, nous ne pouvons

décemment manquer le rendez-vous. Nous devons bien cela à l’État
français, et à ses nucléocrates. Et il serait malséant, après
Fukushima, qu’il y ait 50 000 Allemands pour le bloquer à son arrivée
à Gorleben, et personne pour l’entraver en France.

Alors que huit nouveaux trains de déchets provenant de Hollande
doivent bientôt traverser les gares de RER franciliennes pour rallier
La Hague, nous devons donner raison au collectif Valognes Stop Castor
(http://valognesstopcastor.noblogs.org/ *) : << La question des déchets

constitue le maillon faible de l’industrie nucléaire, et l’illustration
la plus frappante du scandale qu’elle est dans son ensemble >>. C’est
donc là qu’il faut l’attaquer. C’est là qu’il faut, à quelques
milliers, lui porter un coup décisif.

Polluer, c’est toujours s’approprier. En polluant pour les cent
mille ans qui viennent, l’État nucléaire s’approprie tout futur
pensable et toute vie possible. Nous sommes le futur. Nous sommes la
vie. Nous arrêterons les centrales. Tous à Valognes !

Comité anti-CASTOR de Tarnac

=====

* Le texte d’appel au camp :

http://valognesstopcastor.noblogs.org/files/2011/10/CampValognes_folioA3_rectoverso.pdf

Voir aussi :

  1. Fukushima/2012 : Contamination radioactive de la chaîne alimentaire planétaire
  2. Sabotages, spectacles et crise économique

Voir en ligne : « Nous aussi, nous irons à Valognes », communiqué du comité anti-CASTOR de Tarnac

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