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La plus grande décharge nucléaire d’Europe ouvre à 20 km de Belgrade

Alexandar Apostolovski | balkans.courriers.info | mercredi 9 novembre 2011

mercredi 9 novembre 2011

Après avoir été à la pointe de la recherche atomique yougoslave, le site de Vinča, à 20 km de Belgrade, accueille désormais le plus grand entrepôt de déchets radioactifs d’Europe. Les autorités assurent que toutes les mesures de sécurité ont été prises, et qu’il fallait remplacer les anciens hangars délabrés. Mais pourquoi avoir choisi ce site si proche du plus grand foyer de peuplement serbe ? Le reportage de Politika.

Par Alexandar Apostolovski
Traduit par Persa Aligrudić

Un convoi de véhicules de pompiers quitte la route où se trouve la nouvelle construction en béton, connue sous le nom de code X3. Les hommes viennent de terminer une manœuvre en cas d’accident majeur.


« Nous ‘irradions’ tout simplement d’énergie positive », plaisantent les ouvriers qui nous accueillent dans l’immense hangar où ils rangent des tonneaux de couleur jaune à l’aide d’élévateurs. Les 70 hectares de l’ancien Institut des sciences nucléaires de Vinča, désormais propriété de l’entreprise publique Entrepôts nucléaires de Serbie, sont entourés d’un voile de mystères depuis plusieurs décennies.

Le communiqué de la société nationale chargée de la sécurité nucléaire annonçant l’ouverture du « plus grand et plus moderne entrepôt d’Europe pour les déchets radioactifs » a suscité de nouvelles inquiétudes. Pourquoi un si grand entrepôt, dont la construction a pris quatre ans, a-t-il été installé à proximité de Belgrade et de ses deux millions d’habitants ? Rappelons que le site de Vinča venait justement d’être débarrassé de ses déchets radioactifs, qui ont été envoyés en Russie, leur pays d’origine. Va-t-on y stocker les déchets radioactifs de la région, comme l’affirment les militants écologistes ?

Un mot d’ordre : la sécurité !

« Vinča ne deviendra pas une décharge pour déchets radioactifs étrangers », assure Radojica Pešić, directeur de Bâtiments nucléaires de Serbie, citant l’article 2 de la loi sur sur la sécurité nucléaire : « L’importation de déchets radioactifs et de carburant nucléaire usagé étranger est interdite sur le territoire de la Serbie ».

M. Pešić affirme qu’il n’y a pas un seul gramme de déchets radioactifs étrangers en Serbie. « Nous devons avoir une communication directe avec le producteur de déchets radioactifs. Si nous remarquons que dans la documentation celui-ci n’est pas serbe, nous serions obligés d’en informer les organes de sécurité ».

La sécurité est un mot crucial pour Vinča. Le centre fondé en 1948 fut le cœur du programme nucléaire de la Yougoslavie titiste. Le site comptait deux réacteurs de recherches dont un de 6,5 MW fermé en 1984. Il y a deux ans, les affaires de la sécurité nucléaire ont été reprises par Bâtiments nucléaires de Serbie, dont le directeur technique, Milan Orlić, nous conduit jusqu’aux anciens hangars préfabriqués, X1 et X2. Un gardien ouvre le cadenas du portail menant à ces vieux hangars érodés par le temps. Une vingtaine de containers remplis de déchets radioactifs attendent d’être transportés dans le nouveau hangar X3.

Des pressions américaines ?

« Les hangars X1 et X2 abritent les déchets radioactifs provenant de recherches scientifiques, de l’industrie, de la médecine… Il y a là tous les déchets de l’ancienne Yougoslavie. Le X1 est fermé parce que plein. Il a été scellé par l’Agence pour la protection contre les radiations ionisantes et la sécurité nucléaire. Le X2 est utilisé, mais en raison de son mauvais état, il a été décidé de construire le hangar X3. C’est - je l’annonce aux écologistes - la construction la plus verte et la plus sûre de Serbie », explique Milan Orlić.

En fait, à cause du mauvais état des hangars X1 et X2, l’Agence pour l’énergie atomique et le département d’État américain ont recommandé au gouvernement serbe de construire un nouvel entrepôt. Quelles seraient donc les matières radioactives cachées dans X1 et X2 qui pourraient intéresser les terroristes ?

Orlić estime que cela pourrait être le cobalt 60 qui est utilisé dans l’industrie, la médecine, les recherches scientifiques et que l’on trouve en partie dans les paratonnerres radioactifs. « Une bombe sale pourrait être fabriquée et le danger serait le même en cas de vol de césium 137. Voilà pourquoi le hangar X3 est la meilleure solution possible pour la sécurité de Belgrade et de la Serbie », conclut M. Orlić.

« Le plus grand hangar vide d’Europe » ?

Près de l’entrepôt X3 se trouve un autre bâtiment, lui aussi tout neuf. Cet entrepôt, plus petit, abritera les munitions à base d’uranium appauvri utilisées par l’Otan pendant les bombardements de 1999. Jusqu’à présent, elles se trouvaient dans le hangar X2.

Ironiques, les Verts de Serbie constatent que le pays ne dispose pas de réacteur nucléaire, mais qu’il possède par contre le « plus grand entrepôt de déchets radioactifs en Europe ». Un équipement plus nécessaire qu’à la France qui en a pourtant 58 !

Radojica Pešić précise que le hangar X3 peut accueillir 8.600 tonneaux de 200 litres, soit 1.700 m3 de déchets radioactifs. Ce hangar, dit-il, n’est pas le plus grand d’Europe, « c’est le plus grand hangar vide d’Europe ». Son coût est estimé à 2,5 millions d’euros et le permis d’utilisation a été délivré par le ministère de l’Environnement, des Mines et de l’Aménagement.


Voir en ligne : Serbie : la plus grande décharge nucléaire d’Europe ouvre à 20 km de Belgrade

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