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En direct du « Bunker » de la Présidente Cristina Kirchner réélue au premier tour en Argentine

Elise FRIXTALON | actualutte.info | lundi 24 octobre 2011

lundi 24 octobre 2011

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En direct du « Bunker » de la Présidente Kirchner, Hôtel Intercontinental, Buenos Aires Capitale Fédérale

Chronique d’une victoire annoncée. Le 19 octobre, la présidente candidate à sa réélection, Cristina Fernández de Kirchner, a clos la campagne de son parti, le « Front pour la Victoire-Parti Justicialiste » dans un théâtre du Colisée survolté. Au-dehors, sur la place de la Liberté, jeunes et moins jeunes, partisans, militants péronistes, s’étaient regroupés pour soutenir une dernière fois leur candidate. Tout semblait pourtant déjà joué tant le score obtenu par Cristina Kirchner lors des primaires du 14 août (50.24% et une marge de plus de 37% avec le second candidat) n’avait laissé l’ombre d’un doute sur sa réélection. Quatre jours après, dans la salle de réception de l’Hôtel Intercontinental, quartier général et « bunker » du parti au pouvoir, la présidente pouvait célébrer sa victoire en compagnie de ses enfants Máximo et Florencia, et de son Vice-président et ministre de l’Economie Amado Boudou. Elle a recueilli 53.80% des votes soit 11 057 340 votes, plus beau score obtenu depuis le retour de la démocratie en 1983. Dans certaines provinces de l’Etat fédéral et plus précisément à Santiago del Estero et Formosa dans le nord du pays, elle recueille jusqu’à 81.91% et 76.88%. Elle remporte de ce fait un triomphe dans l’ensemble des Etats fédérés, à l’exception de la province de San Luis, fief du candidat A. Rodriguez Saá. Hermes Binner, candidat du « Frente Amplio Popular », de tendance socialiste, a quant à lui obtenu 16.98%. Un écart notable de 36.82% sépare les deux premières forces électorales. Ayant obtenu plus de 45% des votes, Cristina Kirchner est donc selon la loi constitutionnelle élue dès le premier tour. Elle apparaît comme un véritable leader national et amplifie son pouvoir au Congrès. Sur 257 sièges de la Chambre basse, les députés kirchnéristes et leurs alliés peuvent se prévaloir de 131 sièges, soit la majorité, pour poursuivre la politique présidentielle. Un pouvoir d’ors et déjà critiqué par le groupe de presse de l’opposition Clarín dans son édition du 24 octobre alors que certains quotidiens titraient en Une « El Cristinazo » (ou « coup » de Cristina, prise du pouvoir par Cristina). Légitimée par la volonté populaire, elle revient pourtant de loin après avoir essuyé une défaite électorale en juin 2009, défaite qui a placé son parti en minorité au Congrès. Il y a un an à peine, elle était créditée de 35% des intentions de vote. Le décès brutal de son mari a modifié sa communication. Après avoir été Première dame de la nation argentine jusqu’en 2007, elle est devenue première veuve du pays. Cette image, intelligemment construite, ainsi que la récupération des symboles péronistes, ont ému le peuple argentin.

Une matrice de gauche ? Les résultats de ces élections nous offrent à chaud plusieurs indications. La présidente est parvenue à marginaliser l’autre parti de la structure binaire nationale, le parti radical de R. Alfonsin qui a recueilli 11.10% des votes. La division entre péronistes et radicaux constitue-t-elle encore un paradigme pertinent ou l’Argentine voit-elle son offre politique modifiée ? Il est encore trop tôt pour le dire mais il semblerait qu’Hermes Binner dispose à présent d’une véritable force de proposition et d’un espace politique propre. La victoire écrasante du « Front pour la Victoire-Parti Justicialiste » met aussi en exergue la mise à l’écart à une échelle nationale des dissidents péronistes E. Duhalde et A. Rodriguez Saá, candidats recueillant à eux deux moins de 14% des voix. Les alliances et les mésalliances, les marchandages politiques des mois précédant les élections semblent leur avoir porté un coup sévère. Enfin, la coalition de gauche incarnée par le « Front de Gauche et des Travailleurs » de J. Altamira n’a recueilli que 2.33%. S’inscrivant dans la tradition péroniste des années 1945-1955 puis 1973-1974, Cristina Kirchner a su séduire les classes populaires ainsi que la classe moyenne, défendant un « modèle » politique, social et économique initié en 2003 par son mari Néstor Kirchner.

Une femme d’Etat. Dans un discours d’une demi-heure, ponctué de cris, de chants, d’applaudissements, elle a rendu hommage à son mari défunt, dont le premier anniversaire de sa disparition sera célébré le 27 octobre prochain. Chemisier de dentelle noire rappelant un deuil interminable, voix tremblant sous le coup de l’émotion de ne pouvoir fêter cette journée aux côtés de son époux, elle n’a jamais mentionné le nom de l’ancien président, procédant par allusions pronominales. La figure de Néstor Kirchner semblait auréoler une tribune décorée du drapeau national alors qu’une nuit, « étrange, composée de joie et de tristesse » selon les mots de la candidate réélue, naissait. Saluant les présidents de la région parmi lesquels D. Roussef, P. Mujica, S. Piñera, H. Chávez, J-M. Santos, F. Lugo, elle a rappelé la prépondérance des accords sud-américains sous les ovations d’un public trié sur le volet (presse accréditée, cadres du parti, Mères de la Place de Mai, jeunes des organisations militantes en chauffeurs de salle). L’inclusion régionale au sein du MERCOSUR et de l’UNASUR ainsi que la critique des impérialismes nord-américains mobilisent son électorat. Cristina Kirchner, comme son mari auparavant, s’est positionnée pour approfondir l’identité du sous-continent. Se présentant comme la présidente de « tous les Argentins », l’ancienne avocate du sud patagon a plaidé avec emphase en faveur d’une « victoire grande et généreuse » tout en appelant à l’unité nationale. Une unité qu’elle devra mettre en pratique dans la composition de son prochain Cabinet alors que lui sont déjà reprochés l’intégration de membres dissidents. Elle a évoqué ses responsabilités dans la conduite du pays vers une nouvelle histoire et sa volonté de consolider les réformes entamées durant son premier mandat. De ces réformes, l’une d’entre elles a été mentionnée à deux reprises. Il s’agit de la « Loi des Médias », adoptée en 2009. Visant à limiter le pouvoir des oligopoles, elle ouvre les radiofréquences aux concessions renouvelables et crée une Autorité Fédérale des Services de la Communication Audiovisuelle. Pour la présidente et ses alliés politiques, la « Loi des Médias » est venue « démocratiser » l’espace audiovisuel et partant, l’accès à l’information et à l’éducation. Une mesure populaire qu’elle sait rappeler pour emporter l’adhésion immédiate de son auditoire. Consciente des défis qui l’attendent, elle a énoncé, pêle-mêle, désirer davantage d’industrialisation, de valeur ajoutée, de travail, d’écoles et d’hôpitaux dans un pays constituant la troisième économie du sous-continent américain. Elle n’a pourtant pas évoqué la récupération des ressources naturelles, ni la renationalisation du pétrole, le développement du transport ferroviaire, l’urgente protection des peuples dits originaires, la destruction des petites exploitations au profit de la monoculture de soja transgénique, la démocratisation de la santé publique ou encore les répercussions de la crise de la dette en Europe. Mais l’heure était-elle à la polémique ?

 Bénéficiant d’un contexte économique favorable, (une croissance à 8% principalement due aux revenus de la culture du soja, un taux de chômage ayant encore diminué de 0.1% au troisième trimestre pour se stabiliser à 7.2%), d’une opposition au contenu programmatique fébrile, d’un premier mandat marqué par des avancées sociales et une réduction de la pauvreté alors que la crise économique s’enlise en Europe, Cristina Fernández de Kirchner, plébiscitée par les Argentins est la première femme du continent à être réélue à la magistrature suprême. Soixante six ans après le discours fondateur du général Juan-Domingo Perón à la terrasse de la Casa Rosada et alors que la Place de Mai célébrait son triomphe jusque tard dans la nuit, aurait-elle « trouvé un lieu dans le cœur du peuple » ?

Elise FRIXTALON


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Messages

  • Sous la pression des groupes de pouvoir, des corporations médiatiques, de la droite récalcitrante, qui n’ont pas cessé de mettre des gros bâtons dans les roues de son gouvernement — poursuites juridiques aux décisions de l’exécutif, promotion des conflits au sein des agro-producteurs, etc., etc, etc. — Cristina Fernández de Kirchner et son équipe ont tout de même mis en œuvre des mesures sociales en faveur des plus défavorisés (enfants, immigrants, chômeurs et retraités), utilisé des réserves monétaires internationales disponibles, consolidé les institutions …
    En fait, la conjoncture économique favorable que cite l’auteur de l’article comme facteur de la réussite de son premier mandat est étroitement liée à sa gestion politique de redistribution de richesses …

    Voilà pourquoi il n’y a pas lieu de se demander si elle a trouvé un lieu dans le cœur du peuple … Ce lieu elle l’a plutôt gagné, et, même péronisme historique aidant, cela n’a pas été facile …

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