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« en Islande nous avons laissé les banques faire faillite »

Catherine Segurane | agoravox.fr | lundi 5 septembre 2011

mardi 6 septembre 2011

D’après un récent rapport du Fonds Monétaire International (FMI), l’Islande est sur la voie d’un désendettement rapide.

Plus encore : elle demande des comptes : le président islandais Olafur Ragnar Grimsson a demandé dimanche à l’Union européenne de mener une enquête pour déterminer comment elle a pu permettre à la Grande-Bretagne et aux Pays-Bas d’exercer une telle pression sur l’Islande pour tenter de transférer sur le contribuable islandais les sommes dues par la banque Icesave en faillite.

Nous applaudirons sans modération le gouvernement islandais pour sa fermeté et son patriotisme, et nous ferons observer que le remboursement de dettes privées par le contribuable, cela s’appelle du détournement de fonds publics et, là où la justice fonctionne normalement, cela mérite la paille humide des cachots.


Rappel des épisodes précédents :

En 2008 encore, tout va pour le mieux en Islande : les finances publiques sont saines et le pays est noté Aaa depuis cinq ans par l’agence de notation Moody’s.

C’est alors que l’effondrement de son système bancaire hypertrophié a plongé ce pays, dans une crise présentée comme cataclysmique. 

Un article de Courrier International fait un parrallèle entre l’Irlande et l’Islande, toutes deux confrontées à des faillites bancaires : la première, ligotée par l’Europe, se débat dans la déflation. La seconde, libre de faire des choix souverains, serre les dents mais s’aide d’une politique inflationniste et, surtout, refuse de laisser transférer sur le contribuable les dettes des banques en faillite.

Ce refus lui vaut d’être mise sous une pression intense par la Grande Bretagne et les Pays-Bas, soutenus par l’Union européenne, qui voudraient que leurs épargnants soient indemnisés par les finances publiques islandaises.

Lors de deux référendums successifs, les Islandais disent non : pas question que le contribuable dédommage des investisseurs étrangers à la place des banques.

Que croyez-vous qu’il se passa après ces deux refus aussi scandaleux selon les normes des marchés qui nous gouvernent ?

L’Islande est-elle tombée en enfer pour son crime de lèse-marché ? Est-elle mise à l’écart de la vie internationale ?

Que nenni.

Toute d’abord, c’est en 2010, c’est à dire deux ans seulement après le début de la crise, que le FMI commença à observer un début de redressement.

Pour être précis, c’est son représentant Mark Flanigan qui déclarait : “La récession s’est révélée moins profonde que prévu”. Le modèle social nordique a été préservé et l’endettement décroit progressivement, grâce à une forte dévaluation de la monnaie (qui a perdu 30 % en deux ans) et à l’inflation qui atténue les dettes. Le chômage est fortement retombé (de 9,7% à 7,3 %, pourcentage à comparer à celui de l’Irlande : 14,1 %). La reprise se traduit en chiffres (1,3 % au troisième trimestre).

Le président islandais s’en expliquait déjà sans ambages à Bruxelles  : “La différence est qu’en Islande nous avons laissé les banques faire faillite, a-t-il expliqué. C’étaient des institutions privées ; nous n’y avons pas injecté de l’argent pour les maintenir à flot. L’Etat n’a pas à assumer cette responsabilité.”

Selon le Prix Nobel d’économie Paul Krugman, l’Islande s’est relevée plus vite parce qu’elle n’a jamais adopté l’euro. “Elle a fortement dévalué sa monnaie et imposé un contrôle des capitaux. Il s’est alors passé quelque chose d’étrange : bien qu’elle ait traversé la pire crise financière de l’Histoire, elle a été bien moins lourdement sanctionnée que d’autres nations.” Deux ans après le début de la crise, la couronne islandaise a perdu 30 %, les fonderies d’aluminium tournent à plein régime pour satisfaire la demande étrangère, tandis que les produits locaux ont remplacé les légumes exotiques et autres tomates de serre importés.

Aujourd’hui, le FMI, qui achève de verser un prêt, marque à nouveau sa satisfaction.

La candidature de l’Islande à l’Union européenne avance.

Tout ceci malgré le psychodrame avec la Grande-Bretagne et les Pays-Bas, pays auxquels les Islandais ont fermement refusé d’indemniser aux frais du contribuable leurs investisseurs qui avaient perdu de l’argent dans la faillite de la banque Icesave.

Le dernier épisode montre d’ailleurs que ces investisseurs vont être indemnisés, mais par par le contribuable.

En effet, la maison mère d’Icesave, la banque Landsbanki, a annoncé avoir récupéré des fonds suffisants pour rembourser toutes "les réclamations prioritaires". En vertu d’une loi adoptée en Islande après sa crise économique de 2008, tous les dépôts bancaires sont considérés comme "réclamations prioritaires".

Landsbanki a précisé qu’après le remboursement des épargnants lésés, il lui resterait encore 13 milliards de couronnes islandaises (80 millions d’euros).

Cela signifie que les 3,9 milliards d’euros que la Grande-Bretagne et les Pays-Bas ont avancés pour indemniser leurs 340.000 ressortissants lésés par la faillite d’Icesave peuvent être remboursés sans mettre les finances publiques islandaises à contribution.

Du coup, maintenant, c’est le gouvernement islandais qui demande des comptes à l’Union européenne sur le psychodrame que le pays a du subir.

Le président islandais Olafur Ragnar Grimsson a demandé à l’Union européenne de mener une enquête pour déterminer comment elle a pu permettre à la Grande-Bretagne et aux Pays-Bas d’exercer une telle pression sur l’Islande dans l’affaire de la banque en faillite Icesave.

"Comment des Etats membres ont-ils pu accepter les absurdes demandes britanniques et hollandaises ?", s’est interrogé M. Grimsson dans une interview à la radio-télévision publique RUV. "Cela mérite une enquête".

M. Grimsson fait remarquer que " cette affaire aurait pu être traitée de manière raisonnable dès le début, qu’il était absolument inutile de mettre le peuple islandais et notre coopération avec les pays européens dans un tel carcan".

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Transmis par Marina
Tue, 6 Sep 2011 15:45:44 +0000


Voir en ligne : L’Islande, sur la voie d’un désentettement rapide, demande des comptes à l’Union européenne

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