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De l’euthanasie au droit de vivre.

Gérard Charollois | ecologie-radicale.org | dimanche 28 août 2011

dimanche 28 août 2011

Les faits divers ramènent dans l’actualité ce que les simplificateurs de la complexité éthique et sociale dénomment Euthanasie, c’est-à-dire « bonne mort ».
Or, il n’y a pas de « bonne mort » et nul n’a besoin de se soucier d’apprendre à mourir puisque nul, en l’état, n’y manque un jour.

Il est plus opportun d’apprendre à vivre.
Ce que révèle le débat primaire autour d’un étrange « droit à mourir » est le légitime refus de la souffrance.
Pendant longtemps, les religions, écoles de sacrifices et de renoncements à vivre, valorisaient cette souffrance rédemptrice, billet d’entrée dans la félicité de l’arrière-monde. Les mythes eurent,pour actes fondateurs, des supplices édifiants présumés expiations des fautes des humains.
Leur permanence à travers toutes les sociétés humaines correspondait à un fait constant : l’homme subissait des calamités cruelles individuelles et collectives, maladies, accidents météorologiques ou géologiques qu’il ne pouvait ni comprendre, ni maîtriser.
Il était légitime de lui enseigner que ces maux préparaient une félicité à venir.
Feindre d’accepter dans la joie ce que l’on était condamné à vivre représentait une sagesse ancestrale.
Dès lors, les religions d’antan, matrices d’une morale doloriste, récusaient le suicide, l’euthanasie, l’humain devant accueillir les épreuves et les châtiments divins pour mériter sa place auprès du père ou avec quelques dizaines de vierges (ce qui est tout de même plus gratifiant !).
Avec l’émancipation déclarée ou rampante de ces idéologies, avec une amorce encore bien ténue de maîtrise sur le destin individuel et sur une compréhension des lois de la nature, une revendication se manifeste consistant à abréger le supplice final via une médicalisation du décès avant terme.
« Tu accoucheras dans la souffrance et Mouras également dans la souffrance » sont des impératifs passés de saison.

Alors, le simplificateur militant brandit son « droit à mourir dans la dignité ».
Bigre ! « dans la dignité ? »
Y aurait-il des morts dignes et des morts indignes ?
Le mot est malheureux parce que l’idée qui s’exprime n’a pas été clarifiée.
Ce à quoi aspire l’humain désireux d’en finir, humain non frappé d’un trouble thymique pathologique que les DSM et CIM classent dans les dépressions, n’est
nullement de mourir mais de ne pas souffrir.
Confronté à une rage de dent, à une algie faciale fort douloureuse, nul ne songerait à réclamer un « droit à mourir dans la dignité ».
La thérapeutique offre d’autres issues moins cruelles.
C’est en présence d’une souffrance définitive et en l’état de la science irrémédiable que se pose le problème non pas tant d’une euthanasie que d’un droit au suicide assisté.
La loi, dans un esprit de totale laïcité, doit reconnaître, à la personne, cette liberté d’interrompre sa vie,, lorsque n’existe aucun remède à des douleurs devant accompagner l’existence jusqu’à son terme prochain.
Dans une éthique débarrassée des épistémès monothéistes, l’humain dispose d’un droit sur sa propre vie.
Il peut quitter son chemin de vie lorsque celui-ci devient infernal.
Notre éthique hédoniste invite à fuir le déplaisir.
En conséquence, admettons qu’un individu opte pour un suicide assisté.

Oui au suicide assisté mais Non au droit des soignants à assassiner, contre leur gré, des malades, des vieillards, des handicapés dont ils estimeraient, au lieu et place des intéressés, que leurs vies ne valent plus la peine d’être vécues.
En cela, le droit positif de demain devra distinguer, d’une part, la liberté pour une personne consciente et éclairée de demander son propre décès, d’autre part, l’assassinat, sanctionné de peines aggravées, commis par le soignant qui tue de son seul arbitre une personne contre son gré.

En reconnaissant la liberté de suicide assisté, le législateur devra dresser une barrière rigoureuse contre l’eugénisme et les dérives d’un sophisme compassionnel voulant qu’on tue les gens sans avoir préalablement sollicité leur avis et ce pour leur éviter d’avoir à assumer moralement cette décision.
A défaut, d’opérer cette distinction radicale, la société pourrait bien passer d’un dolorisme religieux totalitaire d’antan à un « meilleur des mondes » dans lequel des autorités s’arrogeraient le droit de mettre à mort, au nom de l’euthanasie, d’autres humains un peu trop malades, un peu trop âgés, un peu trop à charge de leurs familles ou de la collectivité.
Si le droit admet la prérogative pour l’individu de mourir lorsqu’il est condamné à des souffrances débouchant sur la mort, il convient aussi de reconnaître à chacun le droit de vivre et de ne point voir sa vie interrompue prématurément par un « généreux » médecin ou une tendre infirmière thanatophiles.
Marginaux, ces soignants au tropisme mortifère ?
Sans doute, mais ils existent.

Des pays limitrophes admettent désormais le droit au suicide assisté que je juge préférable à l’hypocrisie du droit Français qui favorise les abus dans les deux sens : des médecins étant parfois poursuivis devant les cours d’assises pour avoir aidé des gens qui le voulaient à mourir, cependant que d’autres ayant commis le crime absolu de tuer des patients qui ne leur demandaient rien que de les guérir se coulent dans une revendication d’euthanasie.

L’impossibilité de guérir, eu égard aux données de la science, ne justifie pas l’assassinat compassionnel, contre le gré du malade.

Résumons notre pensée :
Le rapport à la vie et à la mort relève du choix individuel et nulle doctrine, nulle autorité ne doivent se substituer à la conscience éclairée d’un humain sain d’esprit pour opter entre vivre ou mourir.

Gérard CHAROLLOIS

CONVENTION VIE ET NATURE
MOUVEMENT D’ECOLOGIE ETHIQUE ET RADICALE
POUR LE RESPECT DES ÊTRES VIVANTS ET DES EQUILIBRES NATURELS

www.ecologie-radicale.org

Note : les DSM successifs représentent la classification des troubles mentaux retenue par la psychiatrie américaine et le CIM 10 est ladite classification vue par l’OMS.
Parmi les troubles dysthymiques, les dépressions sont des affections multiformes et fréquentes en pathologie psychiatrique.
Le dépressif doit être soigné, soutenu, accompagné dans sa souffrance morale, parfois intense et ne saurait être admis, de ce seul fait, au suicide assisté à défaut d’une volonté libre et consciente.


Voir en ligne : De l’euthanasie au droit de vivre.

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