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Huîtres, nucléaire, matières premières : conséquences inattendues du séisme japonais

Cécile Chevré | moneyweek.fr | 28 mars 2011

mardi 29 mars 2011

Ce matin, Simone, de retour de week-end sur la côte Atlantique, est arrivée l’air catastrophé dans mon bureau : « Cécile, j’ai déniché une conséquence foudroyante du séisme au Japon : bientôt, il n’y aura plus d’huîtres ! ».

Plus d’huîtres ? Vraiment ? Finies les orgies de mollusques pendant les fêtes de fin d’années ? Finies les vagues d’intoxication alimentaires ? Finis, les cendriers faits à partir de coquilles vides ?
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Mais comment est-ce possible ? Le nuage radioactif aurait-il détruit les élevages français ? Les courants de mer radioactifs auraient-ils contaminé les côtes françaises ? Que nenni… du moins pour le moment.

Plongeons-nous un peu dans l’élevage de l’huître… Sans l’intervention de l’homme, la reproduction de l’huître est un peu compliquée. D’ailleurs, les huîtres « sauvages » sont en voie de disparition. La main humaine se mêle donc de la reproduction des mollusques.

Les ostréiculteurs achètent donc des larves d’huîtres, des naissains, à des entreprises spécialisées dans leur production. Un peu comme la plupart des éleveurs de poules qui achètent leurs poussins à d’autres éleveurs qui ne font que cela.

Mais voilà, le problème en ce qui concerne les huîtres est que de nombreux producteurs de naissains sont situés… au Japon.

Pourquoi faire venir les larves d’aussi loin ? Parce que, ces dernières années, les naissains français ont été décimés par une maladie qui s’attaque aux jeunes huîtres.

Les ostréiculteurs avaient donc besoin des naissains – sains – nippons pour relancer la culture sur nos côtes.

Malheureusement, la plupart des producteurs de naissains se trouvaient dans la région frappée par le séisme. Outre que les installations ont été détruites par la vague et les inondations, que les ostréiculteurs ne répondent plus au téléphone, les eaux de cette région de l’archipel sont maintenant contaminées par les rejets radioactifs de la centrale de Fukushima.

Et voilà comment un séisme au Japon met en péril un pan de l’économie française. Si comme moi, vous n’êtes pas fan d’huîtres, vous serez peut-être tenté de hausser les épaules. Moins d’huîtres… et alors ?

Pour nous à MoneyWeek, cette histoire est exemplaire. Exemplaire parce qu’elle prouve que les conséquences d’une catastrophe sont multiples, pas forcément évidentes et que parfois, ne se révèlent que sur le long terme.

En attendant… eh bien en attendant, les marchés ont décidé que tout allait bien et qu’il ne servait à rien de paniquer. Conclusion, hop, ils sont repartis dans le vert en fin de semaine dernière. Ce qui se passe en dehors du petit monde fermé de la finance ne les intéresse strictement pas, ou alors si peu.

Sur ce sujet, je laisse d’ailleurs la parole à mon collègue Philippe Béchade qui s’indigne de cette indifférence dans La Chronique Agora : « La quantité de radioactivité émise pourrait dans un avenir proche devenir supérieure à Tchernobyl. La zone de sécurité autour de la centrale pourrait être étendue à 40 ou 50 kilomètres, entraînant des déplacements de population se chiffrant en centaines de milliers. Le périmètre de Fukushima pourrait être inhabitable durant des centaines d’années, voire des milliers d’années pour les zones les plus contaminées ».

« Le chiffrage d’un tel désastre n’est pour l’instant pas encore évoqué tant il pourrait s’avérer étourdissant. Mais c’est à coup sûr une inconnue à plusieurs centaines de milliards de dollars. Faut-il s’en inquiéter ? Quel impact cela pourrait avoir sur l’économie mondiale ? ».

« Nous n’osons privilégier aucun scénario mais d’autres n’ont pas nos scrupules. Charles Plosser, un des bras droits de Ben Bernanke, estime que les marchés ont sur-réagi au drame japonais et que l’impact sur l’économie américaine sera moins lourd qu’envisagé ».

« Nous sommes abasourdi par l’insondable légèreté d’une telle déclaration ! »

« C’est à croire que le Japon est victime d’un simple feu de tourbe comme en Russie l’été dernier ».

« Pas de différence entre l’incinération de quelques centaines de kilomètres carrés de lande désolée et l’irradiation d’une région agricole et industrielle qui représente 8% du PIB nippon. La fumée de Fukushima aura juste fait tousser les Japonais habitant au sud-ouest de la centrale durant deux ou trois semaines… Fin de l’histoire, circulez, y’a rien à voir. Retournez à vos écrans et ramassez-moi le Dow Jones jusque vers 14 000 points ».

Pour conclure cette Quotidienne, je vais oser émettre une petite hypothèse : les marchés ne finiront par rebaisser que quand une catastrophe touchera l’un des leurs. Que la Fed arrête son programme de quantitative easing, qu’une grosse banque fasse de nouveau faillite… alors là oui, les marchés prendront mesure de la crise.

Photo : HIRATA Yasuyuki – Flickr


Transmis par Libertes & Internets

Tue, 29 Mar 2011 12:41:50 +0000


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