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Les drôles de pratiques des fondations et ONG environnementales

Véronique Smée | novethic.fr | 10/02/2011

vendredi 11 février 2011

Amenées à jouer un rôle de plus en plus important dans la sphère publique et bénéficiant d’une forte popularité, les fondations et associations environnementales font l’objet d’un rapport de deux députés sur leur gouvernance et leur financement. Si le bilan est positif pour les associations, les fondations suscitent bien des réserves.

C’est un fait, les associations de protection de l’environnement ont la cote auprès du public. Un récent sondage TNS-Sofres a ainsi montré que 83% des français leur faisaient confiance pour protéger la biodiversité- contre 32% pour le gouvernement. « En matière environnementale, les associations ont une cote d’amour qui ne doit rien au hasard et qui mérite le respect », commente le député Jean-marie Sermier (UMP, Jura) co-auteur avec Geneviève Gaillard (SRC, Deux-Sèvres) du rapport. Par ailleurs, le processus du Grenelle de l’environnement, dans lequel elles ont été très impliquées, ainsi que leur présence au sein du Conseil économique social et environnemental, leur confère un rôle nouveau allant pour certaines jusqu’à la « co-gestion » avec l’Etat sur les questions environnementales. « A ce titre elles sont susceptibles de donner leurs avis sur des dossiers de première importance, souligne Jean-Marie Sermier. Il est donc normal de vérifier leur représentativité autant que leur intégrité ». Une « vérification » qui, pour les associations, s’avère positive. « Notre travail a montré qu’elles fonctionnent bien, qu’elles sont transparentes et même parfois plus contrôlées que d’autres, souligne Geneviève Gaillard. Non seulement il n’est pas difficile d’avoir des informations sur leur gouvernance, mais le secteur est souvent contrôlé par les adhérents et militants eux-mêmes, qui tiennent à évaluer la façon dont sont gérées leurs associations ». Enfin, sur la question du financement, ce ne sont pas les « mieux loties », ajoute la députée. « Elles rendent des services à l’Etat et aux collectivités locales qui ne sont pas rémunérés comme ils le mériteraient ».

Reste que les associations, même quand elles ne reçoivent aucun financement de l’Etat, bénéficient néanmoins des exonérations fiscales accordées aux particuliers qui leur font des dons – ce dispositif présente 1,5 milliard d’euros par an. « Ainsi, explique Jean-Marie Sermier, quand Greenpeace dit ne rien devoir aux pouvoirs publics parce que cette association ne sollicite aucune subvention, la majeure partie de leurs dons est néanmoins concernée par ce dispositif fiscal ». Autre critique, chez certaines ONG, la masse salariale dépasse 50 %, voire 60 % de leur budget total. C’est beaucoup, estime le rapport, qui reconnait toutefois que « la professionnalisation de l’action associative induit désormais des masses salariales élevées ».

FNH et Goodplanet montrées du doigt

Concernant les fondations en revanche, les parlementaires avouent avoir découvert des « situations étonnantes ». « Nous n’avons rien vu d’illégal, certes, mais certaines pratiques nous inquiètent », expliquent-ils. En cause, sur les 21 fondations dédiées à la protection de l’environnement, les deux fondations –très médiatiques- de Nicolas Hulot et de Yann Arthus Bertrand.

Au sujet de la FNH, c’est la composition du conseil d’administration qui interpelle les députés -trois entreprises y siègent : EDF, L’oréal et TF1. Une pratique qui, en soi, ne les choque pas, mais qui néanmoins les interrogent : « les activités particulières de ces groupes semblent problématiques. Ainsi, EDF est une entreprise de pointe dans le secteur nucléaire. Quant à L’Oréal, elle est classée parmi les groupes de cosmétiques dont les produits font l’objet de test sur les animaux, au grand désarroi des opposants à la vivisection. Dès lors, comment interpréter, par exemple, la position très mesurée de Nicolas Hulot sur l’énergie nucléaire ? Quel poids donner à sa parole sur les activités principales de ses deux administrateurs, dont vos rapporteurs ont appris que l’un d’eux finance la fondation à hauteur de 10 % de ses ressources ? »

Et les parlementaires de mettre en garde contre la transformation de partenaires financiers en « codécideurs ». « Dans le pire des cas, que vos rapporteurs ne souhaitent pas imaginer, la parole de la fondation se trouve pilotée par ses administrateurs intéressés sur les sujets sensibles," préviennent-ils.

Dans le cas de GoodPlanet, ce sont les prises de position de son président, Yann Arthus-Bertrand, qui ont conduit les députés à se pencher sur les activités de la fondation qui par ailleurs assure le programme de compensation Action carbone. YAB s’est en effet prononcé pour l’attribution au Qatar de la coupe du monde de football en 2022. Plusieurs députés se sont « émus » de cette décision, au coût environnemental, énergétique et climatique très élevé. Pour répondre à ces critiques, Yann Arthus-Bertrand a fait savoir par courrier que « l’événement serait neutre en carbone, qu’il permettrait de faire apparaître les préoccupations écologiques dans une partie du monde pour l’heure peu consciente des risques du réchauffement climatique, et son espérance de voir le calendrier de l’épreuve déplacé de l’été à l’hiver ». Problème : les députés précisent que le Qatar a financé la traduction en arabe de son film Home. Si sur son site Goodplanet.org Yann Arthus-Bertrand insiste sur le fait qu’il a « bénéficié de la fondation du Qatar et d’Al Jazeera » pour la traduction de Home mais « n’a pas touché un sou » pour avoir exprimé son soutien dans la vidéo de promotion de la candidature de Qatar" . Les auteurs du rapport s’interrogent tout de même : « Est-ce une bonne politique ? » .

Au final, Jean-Marie Sermier et Geneviève Gaillard n’hésitent pas à se déclarer « circonspects sur le poids médiatique acquis par les fondations qui ne représentent souvent qu’une dizaine de personnes et leurs amis ».

En matière d’organisation interne et de gouvernance, ils mettent également en garde ONG et fondations sur la composition de leurs conseils d’administration. Ils constatent en effet une « similitude » entre les associations et le monde des affaires, concernant les « participations croisées » : ainsi la fondation Goodplanet accueille dans son conseil d’administration Serge Orru, directeur général du WWF, tandis que yann Arthus-Bertrand est administrateur des Amis du WWF, association qui fédère les sympathisants de la fondation WWF France et qui gère ses contentieux. Or, le « contrôle réciproque n’a pas que des vertus », rappellent-ils.

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Voir en ligne : Transparence, financement : les députés se penchent sur les fondations et ONG environnementales

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