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Honduras : « Ils ne pourront jamais arrêter notre lutte »

Giorgio Trucchi | resistenciahonduras.net | Lunes 17 de Enero de 2011

mercredi 19 janvier 2011

Foto : Juan Chinchilla

Après avoir échappé à ses ravisseurs, encore fatigué physiquement et psychologiquement par l’expérience limite vécue pendant les 48 dernières heures, le dirigeant paysan du Mouvement Unifié Paysan de l’Aguán et du Front National de Résistance Populaire (FNRP), Juan Ramón Chinchilla, a accepté de parler depuis une localisation incognito au Honduras avec Sirel.

Par Giorgio Trucchi - Rel-UITA *

Peux-tu nous raconter comment tu as été enlevé ?

L’après midi du samedi 8 Janvier je suis allé rendre visite à des amis dans un centre commercial. En sortant de cet endroit, j’ai pris ma moto pour aller à la communauté de La Concepción, mais je m’étais aperçu qu’on me suivait. Presque au moment d’arriver à la Concepción, j’ai trouvé un camion qui bloquait la route. A ce moment là, je me suis aperçu que derrière les palmiers il y avait des gens qui dirigeaient leurs armes sur moi.

Que s’est il passé ensuite ?

Je me suis arrêté et j’ai laissé tomber la motocyclette par terre. Plusieurs hommes masqués m’ont pris, ils ont tiré sur la moto et ils m’ont fait monter dans une voiture, couvrant mon visage pour que je ne puisse pas voir où on se dirigeait. Il y avait beaucoup de gens, presque tous habillés en militaires, en policiers ou en gardes privés de Miguel Facussé. Ils ont démarré la voiture et ils ont roulé pendant environ 40 minutes vers Trujillo. On est arrivé à un endroit isolé où on m’a mis dans un entrepôt et ils ont commencé à me poser plein des questions.

Qu’est-ce qu’ils voulaient savoir ?

Si on avait des armes, d’où sortait l’information qui était mise sur internet et combien de paysans étaient organisés. Ils avaient beaucoup de photos de moi et d’autres personnes. On voyait qu’ils étaient bien organisés et que l’opération avait été minutieusement préparée.

Quand est-ce qu’ils t’ont frappé ?

C’est arrivé l’après midi du dimanche. Ils m’ont soulevé et ils m’ont montré une table où ils avaient des outils de torture. Ils ont commencé à parler entre eux. Ils disaient : qu’est-ce qu’on va lui faire d’abord ? On lui arrache un ongle, ou on le brûle ? Après ils ont commencé à me frapper au visage, ils m’ont brulé les cheveux, ils disaient qu’ils allaient verser de l’essence sur ma tête et qu’ils allaient me bruler. Ils m’ont frappé le dos avec une matraque. Il y avait plusieurs étrangers. Certains parlaient anglais, tandis que d’autres parlaient une langue que je ne comprenais pas.

Comment as-tu réussi à t’échapper ?

Dimanche soir on m’a sorti de l’entrepôt et on est parti en marchant dans l’obscurité. J’ai pu entendre une conversation dans laquelle ils disaient que pour le moment l’ordre était de ne pas me tuer, donc, j’ai été encouragé. On est monté sur une colline, et comme je n’étais pas attaché j’ai profité de l’obscurité pour commencer à courir pour rentrer dans une forêt qui se trouvait à proximité. Les hommes m’ont chassé en me tirant dessus, mais j’ai réussi à me cacher. J’ai couru et j’ai marché pendant long temps jusqu’à ce que j’aie pu trouver quelqu’un qui m’aide, et que je puisse me communiquer avec les camarades.

D’après toi, Quel était l’objectif de cet enlèvement ?

On est en lutte contre les propriétaires terriens. On sait que nos ennemis sont Miguel Facussé, René Morales y Reinaldo Canales, et que le gouvernement les appuie à eux, pas au peuple. Le département [NDLT : Colon, au nord du pays] a été militarisé deux fois, et on sait qu’ils vont utiliser tout type de moyen pour en finir avec notre lutte. Ils avaient des photos et beaucoup d’information sur nos organisations et leurs membres. Ils veulent nous intimider.

Ton enlèvement a suscité un fort courant de solidarité et de dénonciation au niveau national et international. Crois-tu que cela ait contribué à arrêter la main meurtrière de tes ravisseurs ?

Ils étaient préoccupés par la pression au niveau national et international. Ils suivaient les nouvelles par internet et la radio, et c’est pour ça qu’ils ont décidé de me transporter ailleurs. Je crois aussi que toute cette pression a contribué à ce que rien de plus grave ne m’arrive. Je remercie infiniment toutes les personnes et les organisations nationales et internationales qui se sont mobilisées, ainsi que les medias qui ont dénoncé mon enlèvement.

La lutte continue toujours. Je ne vais pas m’arrêter, il faut plutôt continuer avec plus de force. On doit rester unis, parce que c’est la seule manière de faire avancer le pays. On n’accepte pas le coup d’état, et on ne va jamais l’accepter, même s’ils nous tuent. Je n’arrêterai jamais la lutte. Mieux vaut mourir que trahir.

Cet’entretien a été traduit par GC de “Jamás podrán detener nuestra lucha


Voir aussi :
www.frontlinedefenders.org


Voir en ligne : Ils ne pourront jamais arrêter notre lutte

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