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Bettencourtgate et cambriolages de journalistes : « Causeur », le rendez-vous réac des imbéciles

plumedepresse | 2 novembre 2010

mardi 2 novembre 2010

Pas un cambriolage, pas deux, mais trois : sur une période de deux semaines, les rédactions de Mediapart, du Monde et du Point ont été visitées par de mystérieux voleurs et les ordinateurs de journalistes travaillant sur le dossier Bettencourt dérobés. Rappelons qu’il s’agit d’une affaire d’État : le ministre Eric Woerth est lourdement soupçonné de « trafic d’influence par une personne investie d’un mandat électif » et de « financement illicite de parti politique ou de campagne électorale », au bénéfice du président de la République en exercice, Nicolas Sarkozy, dont l’élection s’en trouverait invalidée si les faits étaient avérés. Et c’est dans ce contexte tout sauf anecdotique que ces mystérieux vols surviennent : largement de quoi se poser des questions, donc ! « C’est très étrange (…) Ça révèle des moeurs de République bananière auxquels on est habitué dans ce pays, avec toutes ces officines, qui courent dans tous les sens… Au service de qui ? Je ne sais pas, suivez mon regard… », réagit le directeur du Point, Franz-Olivier Giesbert. « Comme par hasard, le journaliste du Point travaillant sur cette affaire, Hervé Gattegno, a été victime du vol de son ordinateur portable, tout comme avait été volé le portable (et en prime, le GPS) de Gérard Davet, journaliste du Monde, enquêtant lui aussi sur le même sujet. Et devinez quoi, très exactement le même jour, expose l’eurodéputée Nathalie Grisbeck, en charge de la Justice au sein du Modem : On laissera aux spécialistes le soin de calculer exactement le taux de probabilité pour qu’un tel concours de hasards se produise ! Mais nous le savons tous, ici la vraisemblance tend vers zéro. » « Je trouve qu’il y a beaucoup de vols en ce moment dans les organes de presse… », observe plus sobrement l’ancienne ministre de la Justice socialiste, Marylise Lebranchu.

Dans son style bien plus offensif, le député Vert Noël Mamère dénonce des « pratiques de barbouzes » : « On a face à nous un gouvernement qui a été capable de violer par deux fois le secret des sources, qui a placé des journalistes sur écoute, donc la réponse me semble évidente. Ce gouvernement utilise des pratiques de barbouzes, ni plus ni moins. On vit dans une république bananière, où on va essayer de nous faire croire que des plombiers volent des ordinateurs la nuit, en oubliant de voler également les bijoux et la chaîne stéréo*… Dans l’histoire, c’est Sarkozy le plombier aux petits pieds ! » Le Figaro traduit : « Il faisait allusion aux deux enquêtes de police visant à identifier les sources de certains journalistes dans l’affaire Bettencourt. La première, menée cet été par le contre-espionnage, portait sur les articles de Gérard Davet (du Monde, NdA). Elle a identifié un magistrat du ministère de la Justice, qui a été limogé. La seconde a été menée ce mois-ci à la demande du procureur de Nanterre Philippe Courroye qui souhaitait vérifier si deux journalistes du Monde communiquaient avec la présidente du tribunal Isabelle Prévost-Desprez : leurs factures détaillées de communications téléphoniques ont été examinées par la police. Le quotidien du soir a déposé plainte par deux fois, jugeant qu’avait été violé le secret des sources, protégé par la loi. Le procureur de Paris Jean-Claude Marin n’a pas encore donné suite à ces plaintes, mais il a demandé au contre-espionnage de lui livrer les éléments de son enquête, ce que le service a refusé en invoquant le « secret-défense ». Stupéfiant aveu : les services secrets français considèrent donc officiellement qu’identifier les sources de journalistes mettant en doute la légalité du financement de la campagne présidentielle de Sarkozy relève de la protection de la patrie en danger ! Mais revenons à nos trois cambriolages : ne pourrait-il s’agir d’un hasard ? « Ce sont quand même deux grands journalistes d’investigation qui travaillent sur la même affaire, très sensible, et vous allez me faire croire que c’est une coïncidence ?, s’emporte Mamère. Seul un imbécile ne ferait pas le lien entre ces deux affaires ! »

Il a dit « imbécile » ? Le fleuron de la « réacosphère », Causeur, répond présent ! « Ces dernières semaines, j’ai pu constater la disparition, dans mon chalet d’alpage, d’une chaine de tronçonneuse, d’un piège à souris d’un modèle que je me garderai bien de définir plus avant, sous peine d’être accusé d’homophobie, et d’une loupe habituellement utilisée par mes petits-enfants pour mettre le feu à des brins de paille en concentrant les rayons du soleil, écrit Luc Rosenzweig, pris d’une fulgurance humoristique dans un court billet titré Mon cambriolage, je l’ai pas volé : Je n’avais pas fait le rapprochement de ces disparitions mystérieuses avec le fait d’avoir abordé, sur Causeur, l’affaire Bettencourt-Woerth. En y réfléchissant selon la méthode Plenel, il est maintenant clair que l’on a voulu, du côté de l’Elysée, me faire passer le message suivant : « Tu es fait comme un rat, on t’a à l’œil et si tu te t’écrases pas, on te découpe en rondelles… » Quelle signification accorder à cet articulet ? Rosenzweig s’en prend à « la méthode Plenel », que son « raisonnement » par l’absurde désigne comme paranoïaque. A suivre le journaliste de Causeur, le patron de Mediapart a tort de faire un lien entre les trois cambriolages et le bettencourtgate. Donc, selon lui, tout cela ne serait qu’affaire de coïncidences : en voulant ridiculiser Edwy Plenel, Rosenzweig se ridiculise lui-même, et pas qu’un peu !

Que dit précisément le moustachu journaliste, et est-ce si absurde ? Réponse dans Sud Ouest : « pour Edwy Plenel, président et cofondateur de Mediapart, la répétition des intrusions est tellement grossière qu’elle est forcément voulue. « Il s’agit avant tout d’une manœuvre d’intimidation. Ni nos informateurs ni nos informations n’ont été mis en péril par le cambriolage. Leurs auteurs cherchaient à impressionner nos sources. Ils ne voulaient surtout pas se montrer discrets, il fallait que ça se sache ! On veut intimider la démocratie plus que voler des journalistes. En ce sens, c’est plus grave », jugeait-il ». On a vu plus haut qu’il était loin d’être le seul à suspecter une barbouzerie.

Ajoutons la voix de Dominique Pradalié, responsable Communication du Syndicat national des journalistes (en poste à France 2) : « On peut clairement faire un lien entre ces trois vols, estime-t-elle. Cette affaire montre que les journalistes ont des sources qui inquiètent le pouvoir et qu’il y a une vraie peur de l’État. Cette volonté d’intimider les sources est scandaleuse. » Même son de cloche, enfin, du côté de la Secrétaire nationale à la Justice du PS, Marie-Pierre de la Gontrie : « La liberté de la presse qui passe par la protection des sources des journalistes doit être garantie avec détermination », écrit-elle. N’en jetons plus, la coupe est pleine : tout être normalement sensé, confronté à une épidémie de cambriolages survenue dans un tel contexte, se pose au minimum des questions. Pas Rosenzweig, qui évacue l’affaire avec désinvolture, sans doute persuadé d’être follement spirituel. Comment trouver une explication rationnelle à cette position aberrante ? Hasardons-en une : après des semaines entières passées à ne parler que de l’antisociale contre-réforme des retraites et du légitime mouvement de contestation qui tente de s’y opposer, de ses manifestations monstres, de ses blocages et de la pénurie d’essence qui en a résulté, voilà que le bettencourtgate revient à la Une de l’actualité. C’en est trop pour les gens de Causeur, qui aimeraient bien qu’on se remette enfin à parler des vrais problèmes de la France, qui sont évidemment la bien-pensance, le droit-de-l’hommisme et le politiquement correct, qui interdisent de briser les tabous à propos de la polygamie, du racisme anti-blancs et de l’islamisation de la France…

* « Dans la pièce se trouvaient d’autres équipements de valeur, dont un appareil photo numérique et une console de jeux, laissés sur place », rapporte Le Figaro concernant le cambriolage du domicile de Gérard Davet, le journaliste du Monde.


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