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Selon que vous serez politicard ou quidam…

Superno | superno.com | mardi 26 mars 2013

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Selon que vous serez politicard ou quidam…
Superno | superno.com | mardi 26 mars 2013

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Le politicard est un être humain comme les autres. Enfin presque. Car un examen attentif permet tout de même de voir quelques différences avec un quidam ordinaire.

Un seul exemple. Lorsque le quidam fait son marché, habillé comme un dimanche matin, c’est à dire mal, il déambule entre les étals à la recherche de tomates, de carottes ou de salades, jaugeant la qualité, comparant les prix. Le politicard, lui, ne va pas sur les marchés, il n’a pas que ça à foutre. Sauf les trois dimanches avant les élections, quelles qu’elles soient. Mais il ne vient pas pour les légumes. Endimanché, l’air faussement jovial, accompagné de quelques militants qui pourraient le cas échéant servir de gardes du corps, il distribue des tracts à la gloire de ses dons thaumaturgiques, comme celui de vaincre le chômage ou le marasme économique. Ou l’immigration chez quelques spécimens… Car on peut éventuellement observer quelques variations selon les partis… Enfin, sur les programmes, car dans la réalité, lorsqu’ils sont élus, les politicards appliquent principalement le programme de la Troïka et du MEDEF. Bref.

Ce n’est pas le sujet du jour. On va plutôt brosser un portrait comparé du quidam et du politicard lorsque pour leur malheur (et dans les deux cas pour notre bien) ils sont confrontés à la justice.

D’abord, le quidam ordinaire va au tribunal à pied. Ou en bus, en métro, en bagnole, en train (c’est de plus en plus loin). Ou carrément entre deux flics. Il arrive que le politicard y aille en jet privé. C’est une première différence.

Autre différence, le quidam ordinaire se rend devant la justice à reculons, la trouille au ventre. Il fait profil bas. Il se tait. Il faut dire que personne ne lui demande ses impressions.

Ce qui n’est pas le cas du politicard. Tout ce que le pays compte de journalistes, enfin ceux qui ne sont pas préposés à la surveillance de la couleur de la fumée de la Chapelle Sixtine, ou à la confection de radios-trottoirs sur la météo hivernale, veut absolument connaître ses sentiments.

Dans ces circonstances contraires, le politicard s’exprime rarement directement. Il délègue son avocat (pardon, un de ses avocats), généralement choisi parmi les plus chers, et donc censément les plus efficaces de la place. Le stagiaire qui découvre le dossier un quart d’heure avant l’audience et qui se contentera de plaider d’un air faussement convaincu l’enfance malheureuse et la volonté de se réinsérer du prévenu, c’est juste bon pour le quidam, pas pour lui.

L’avocat du politicard affirme donc sans rire que son client est heureux de pouvoir s’expliquer devant la justice, où sa bonne foi et son innocence éclateront évidemment devant la terre entière. D’ailleurs on se demande comment quiconque peut en douter.

Un point commun entre les deux : le quidam comme le politicard sont “présumés innocents”. Le quidam qui vient de se faire gauler en flagrant délit de tirage d’iPhone dans le métro pour la troisième fois de la semaine est lui aussi présumé innocent. Cette rengaine sur la “présomption d’innocence” commence d’ailleurs à me les briser menues. Oui, avant d’être condamné, tout justiciable est présumé innocent.

Mais chez le politicard, “présumé innocent” se transforme systématiquement en “forcément innocent”. C’est même la preuve de son innocence. Parce que c’est lui, enfin. Il ne peut pas être confondu avec cette racaille sordide. Il a quand même plus de classe, lui. Quand il soutire 150000 euros à une vieille dame, il choisit la plus riche du monde. Quand il va planquer quelques millions d’euros, ce n’est pas l’argent du braquage du tabac du coin, et il ne va pas le mettre chez Dragomir le fourgue d’Aubervilliers : c’est de l’argent de la corruption, de la fraude fiscale, ou de la rétrocommission, de l’argent qui sent le manteau de vison, le cuir Connolly ou la frégate taïwanaise, et qui va être mis au coffre par la banque UBS de Genève, qui même si “elle n’est pas forcément la plus planquée des banques”, connaît les bonnes manières avec ses riches clients. Comme le juge Van Ruymbecke va bientôt s’en rendre compte.

Le voleur de téléphones baisse la tête et devant le juge, se contente de nier les évidences par principe, avant d’accepter, résigné à l’avance, sa condamnation. Il ne fera même pas appel, il veut en finir au plus vite. Et s’il n’est pas assez pauvre pour avoir un avocat gratuit, toute prolongation de la procédure lui coûtera trois mois de salaire. Souvent d’ailleurs, il ne comprend même pas la sentence, ne sait pas s’il va en taule ou non, son avocat commis d’office doit lui expliquer.

Le politicard, lui, hurle à son honneur outragé, envoie sa clique de perroquets d’élevage inonder les médias avec les éléments de langage préparés par des marchands de lessive, et lance une armée d’avocats sur la trace d’une “question prioritaire de constitutionnalité” ou autre artifice de procédure destiné à noyer le poisson (et le dossier en même temps, la prescription n’est pas si loin…). Si la décision ne lui convient pas, il fera appel, il se pourvoiera en cassation, il invoquera la cour de justice européenne, ou que sais-je encore. Et si au final il était tout de même condamné, il prendrait le peuple à témoin pour hurler à l’erreur judiciaire.

Sarkozy, après avoir menacé le juge et laissé son avocat hors de prix raconter des salades devant les médias, est donc remonté dans un jet privé pour rentrer chez lui et a lancé son armée de perroquets à l’assaut des médias.

Au passage, quand je pense que certains analystes politiques grassement payés peuvent penser que Sarkozy reviendra se présenter en 2017… Un doute m’habite. Vous le voyez passer 5 années de plus avec un salaire minable de 12 696 euros nets par mois ? Alors qu’il peut gagner des millions en donnant des conférences ineptes, des conseils tarifés au prix fort, ou présider un fonds d’investissement dans un paradis fiscal ?

Si nécessaire, le politicard demande à ses communicants de lui trouver une stratégie pour accréditer la thèse de son innocence bafouée, thèse qui il faut bien le dire, est assez improbable. Le juge ne met en examen que s’il dispose de preuves, ou du moins d’indices concordants. Et dans les deux affaires qui nous préoccupent, c’est de tout évidence le cas, tout le monde peut le voir. Sauf les aveugles, bien entendu.

Comble de la clownerie, les communicants de Sarkozy lui ont conseillé un message sur Facebook. Sans même se poser la question du ridicule de la chose. Je uppose qu’ils ont dû lui expliquer ce qu’était Facebook. Sarkozy sur Facebook, c’est à peu près aussi improprobable que Balladur qui fait du stop, ou Ribéry qui étudie l’histoire de l’art. Qui peut croire à cette mise en scène grotesque, qui ne peut en fait que renforcer les soupçons ? Une seule explication : le politicard prend constamment l’électeur pour un épais crétin. Et puisque l’électeur continue à voter pour lui, l’assertion est en fait assez pertinente.

Ceux qui s’offusquent de la mise en examen de Sarkozy dans l’affaire Bettencourt n’ont qu’à lire le livre “Sarko m’a tuer” , et notamment le chapitre consacré au calvaire de Claire Thibout, comptable des Bettencourt, et le traitement “à la Poutine” (balle dans la tête en moins, par chance) qu’elle a dû subir. Sans parler de son copinage tellement énorme avec le procureur Courroye. Entraver la justice de manière aussi éhontée, c’est carrément plus grave que d’aller minablement taxer 150000 euros à une milliardaire. Rien que ça mériterait de la prison ferme.

Il faut dire que Sarko a de qui tenir. Nourri au lait de Pasqua et de la Chiraquie. Chirac qui fut le plus redoutable gredin de la 5ème République, commettant un nombre de délits effarant (élections truquées, marchés publics bidonnés, racket des entreprises, emplois fictifs, “frais de bouche”…), et envoyant péter la justice avec des lois faites sur mesure pour lui. Ce n’est qu’en 2011, une vingtaine d’années après les faits, et alors que son gâtisme était avéré, qu’il a enfin fini par être condamné pour une infime partie de ses forfaits à deux ans de prison avec sursis (évidemment) pour « détournement de fonds publics », « abus de confiance », « prise illégale d’intérêts » et « délit d’ingérence », étant même qualifié par le tribunal d « initiateur et auteur principal des délits »

Il est fort possible que dans cette affaire, Sarkozy s’en sorte, faute de preuves. J’espère simplement que d’ici là, la justice aura pu faire son travail dans d’autres affaires bien plus lourdes (et sorties également par Médiapart) comme l’affaire Karachi (où il y a eu mort d’homme), l’affaire Kadhafi (où les sommes en jeu sont 300 fois plus élevées que dans l’affaire Bettencourt), le scandaleuxissime deal avec Tapie (8 fois Kadhafi !), ou encore (cette fois c’est le Canard), le marché public douteux du “Pentagone à la française”, remporté pour plus de 3 milliards d’euros (8 fois Tapie) par son ami Bouygues.
Autre chose qui m’afflige profondément, c’est le comportement des supporters des deux camps. “Supporters” est bien le mot. Le supporter, c’est le gars, qui voyant un gars de son équipe faucher de manière flagrante et par derrière un “salaud d’en face” se met à hurler à peine l’arbitre a-t-il sifflé : “salaud, pourri, mais y’a rien, bordel, il est tombé tout seul ! De toute façon c’est un bien fait pour sa gueule c’est un bâtard”. Et inversement, si un “salaud d’en face” effleure, même accidentellement, une de ses idoles, et que l’arbitre laisse jouer, c’est aussitôt la bronca “Salaud, vendu, fils de pute, y’a pénalty, là, hooooooooooooooooooooooouuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuu”

Si la métaphore footballistique ne vous parle pas, pensez alors au Mandarom , à son gourou, et à ses disciples qui ont perdu jusqu’à la plus petite particule de sens critique.

Quand on est de droite, Sarkozy est forcément innocent, simplement parce qu’il s’appelle Sarkozy. “Non mais sincèrement, vous le voyez abuser une vieille dame ?” Le juge, lui, est un médiocre qui “veut se payer un puissant”. Et Médiapart veut vendre des abonnements. Et la “gauche” au pouvoir a forcément instrumentalisé le juge pour faire un écran de fumée destiné à planquer Cahuzac.

Quand on est de “gauche”, Cahuzac est forcément victime d’un coup monté de son adversaire UMP, et de Médiapart en difficulté économique qui cherche à racoler ses prospects par tous les moyens les plus vils. Personnellement, j’ai du mal à accepter qu’un mec de gauche puisse parfois être aussi con qu’un mec de droite. Mais quand on est supporter avant tout, il ne faut s’étonner de rien.

Pire, si toi, petit blogueur sans réseau, qui as des idées de Gauche, tu oses émettre l’idée que Cahuzac pourrait ne pas être réellement représentatif de ce que devrait être la Gauche, ou que tout politicard ripou, qu’il soit de droite ou se prétende “de gauche”, doit être éradiqué du système, houlala, que n’as-tu pas dit là ? Mais malheureux, tu fais le jeu du FHaine ! Tu es l’idiot utile de Sarkozy !

Ah oui, le FHaine. Il est encore en train de revenir au centre du jeu. Parce que deux tiers d’électeurs ont refusé (comme je les comprends) de venir arbitrer un duel grotesque entre une candidate Fhaine lambda et Mancel, escroc multiréciduviste et honte de la politique prétendûment repenti. Un symbole de ce que la “politique” est devenue, sous les cris d’indignation des politicards, de “gauche” comme de droite qui se succèdent tel le vortex d’un bidet qui se vide, et qui par leur nullité crasse, leur incompétence absolue, leur aveuglement impardonnable, et leur morgue infinie sont les principaux responsables de la situation.

Et puis ça les arrange. Le Fhaine, c’est le repoussoir censé nous obligé à être “raisonnables”, et à aller voter pour un “socialiste” ou un UM”P” (à la rigueur un Bayrou), peu importe du moment que ce soit un politicard “normal” qui attend “le retour de la croissance” en payant la dette indue aux banksters, baissant les “charges” et les dépenses publiques, et promettant, comme le barbier qui demain rase gratis, que le “chômage baissera l’année prochaine” . There is no alternative®.

Quant aux sarkozystes, leurs cris de gorets qu’on écorche sont tout simplement pathétiques. Quand Copé vient se porter garant de la moralité de son parrain, sur le mode “ça ne lui ressemble pas” (les mots exacts des marchands de lessive qui défendaient DSK… les mots qui font sourire aujourd’hui…), on ne sait plus si on doit rire ou pleurer. Et s’il n’y avait que Copé : même Carignon, le symbole même de la corruption, l’un des seuls politicards à avoir tâté du cachot, est venu montrer sa fraise à la télé pour défendre le Grand Homme. Sans parler des Balkany… Pour eux, on en est sûr, il vaut mieux rire pour éviter le désespoir. Si Al Capone avait été dispo, on l’aurait certainement entendu vanter les qualités de son ami Nicolas…

Tout, il faut tout changer. Ce système est vicié du sol au plafond.

Non seulement le système actuel n’interdit pas aux ambitieux incompétents de se présenter, mais c’est l’inverse ! Il empêche tout compétent non prétentieux d’avoir la moindre chance. Les médias des puissants n’invitent que ceux qui leur conviennent, distribuant bons et mauvais points (les bons points étant pour les plus serviles thuriféraires du libéralisme, y compris et surtout s’ils sont incompétents et malhonnêtes) n’hésitant pas à qualifier de “populistes”, (comme si s’occuper des intérêts du peuple était une insulte) ceux qui osent dévier des dogmes libéraux de l’exercice imposé. Quant à ceux qui ne passent pas dans les médias n’existent pas, c’est aussi simple que ça.
Comme le dit Etienne Chouard, ces politicards devraient être nos esclaves, obéir à nos ordres, se mettre en quatre pour que nos souhaits se réalisent. Au lieu de ça, ils ont renversé le schéma, se sont érigés en statues du haut desquelles ils nous contemplent avec une suffisance insupportable. Réfléchissons ensemble aux moyens à mettre en oeuvre pour empêcher les médias et les carriéristes nuls et corrompus de piper le choix de nos représentants. Et de mettre en place une Démocratie, une vraie.

Pourvu que les juges tiennent bon.


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