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Les Rroms sont le miroir des banlieues

Laurent Ott | questionsdeclasses.org | vendredi 15 mars 2013

vendredi 15 mars 2013

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Les Rroms sont le miroir des banlieues
Laurent Ott | questionsdeclasses.org | vendredi 15 mars 2013

Ces dernières semaines et ces derniers mois n’ont apporté aucune trêve aux enfants et familles Rroms qui tentent de survivre dans des bidonvilles ; accusées des conditions qu’on leur inflige, ces populations font par ailleurs l’objet d’un racisme encouragé et quelquefois cultivé pâr nos politiciens.

Quelques faits vécus récemment :

- des enfants qu’on a refusé de scolariser à Ris Orangis pendant des mois et qu’au final le Maire de la commune a regroupé dans un gymnase avec - curieusement - deux enseignants de l’Éducation Nationale. Ce gymnase n’était pas une classe ; ces enfants n’étaient pas inscrit à l’école... Et on trouve des enseignants à mobiliser pour ce genre de travail. Cherchez l’erreur

Le campement de Moulin Galant (Corbeil/ Ormoy) où nos association amis en oeuvre depuis 4 ans des activités éducatives, d’éveil, d’éducation populaire. Sera sans doute expulsé avant la fin du mois de mars.

Idem semble t il pour le second où nous intervenons, et le dernier (Ris, justement)

A quoi , à qui sert un tel désordre ? Comment fabrique t on la marginalité, l’exclusion en se donnant l’air de la dénoncer ?

Peut être justement en voulant renvoyer le Rrom à une étrangeté absolue, un "inassimilable", un "barbare". On veut faire de la différence

Mais en quoi sommes nous si différents et en quoi le sort des banlieues , des enfants des milieux populaires est il donc si différent ?

Selon le réseau universitaire NETRACES (Network and Research and Action on European Slums) , il est difficile de définir par un critère unique le phénomène de ghettoïsation , de marginalisation spatiale , et de précarisation de groupes sociaux ou ethniques en Union européenne.

En effet, en fonction des pays ou régions, ces quartiers sub-urbains de concentration de la misère peuvent se situer en périphérie, ou bien en centre ville, mais aussi parfois dans des zones rurales environnantes. Ils peuvent également être constitués de formes d’habitat divers : grands ensembles, lotissements, bidonvilles, habitat rural dispersé, … La diversité est de règle.

Mais par contre ce qui caractérise TOUJOURS la ségrégation spatiale et sociale, au delà des particularités ce sont 4 critères que l’on retrouve partout, sous la forme de quatre manques, pour ces territoires :

 Manque de ressources économiques,
 Manque de ressources en dispositifs sociaux adaptés aux besoins spécifiques,
 Manque de représentation politique et de ressources politiques d’influence et de décision,
 Manque de sécurité administrative légale, difficultés liées à des statuts juridiques problématiques

De ce point de vue, nul ne subit autant un tel désastre, selon ces quatre critères, que les Rroms et particulièrement en France.

Mais pour autant, nos banlieues, nos quartiers sont ils réellement mieux lotis ? En est on sûr ?

Pour ceux qui arpentent les rues, les espaces publics, ceux qui vont au devant des familles, sans se limiter à un critère ou un champ d’intervention limité, …le constat est grave :

Dans les zones défavorisées, et notamment dans les banlieues, comme la nôtre, les gens, les groupes font face à des RUPTURES économiques, sociales, politiques , légales , avec de moins en moins de ressources.

Où sont en effet les ressources propres de nos territoires ? En matière de production, de décision, de pouvoir d’agir, de prise en considération de la réalité vécue ?

Les gens ne sont ils pas chaque jour un peu plus forcés d’adapter leurs demandes et leur réalité à des exigences et des limites des dispositifs qui s’éloignent sans arrêt de leur vécu réel, soit qu’ils n’en prennent pas la mesure, soit qu’ils en ignorent les modalités ?

Les Rroms constituent ainsi un peu de vérité sur ce que nous vivons tous les jours : la perte de nos assurances économiques et sociales, de nos moyens d’agir et d’influencer la politique, et la pénalisation qui progresse à tous les étages de la société.

Comment ne pas voir dans cette similitude , cette conjonction entre ceux qui sont au bout d’un processus , et ceux qui y sont chaque jour un peu plus conduits ?

Il n’est pas étonnant, à ce compte là, qu’ils fassent l’objet de tant de rejets . On refuse souvent de voir ce qui nous ressemble et rien n’est pire qu’un miroir tendu à l’impuissance.

Les expulsions subies par les familles Rroms ne sont elles pas à l’image de toutes les petites expulsions de nos vies quotidiennes ? Expulsions éducatives et scolaires, perte d’emploi, perte de repères, ruptures, perte de visibilité et de représentation dans les espaces publics ?

C’est parce que les Rroms sont en avance sur nous , par de nombreuses ruptures, parce que le vécu de ces familles et de ces enfants , en France ,nous oblige à regarder la réalité en face, qu’ils subissent tant de violence pour que nous ne les voyons plus.

A l’inverse de cette violence, il nous semble urgent que les acteurs sociaux réalisent cette similitude, qu’ils sortent des réflexes d’étrangeté et de mise à distance (« Ce n’est pas mon travail » ; « Je ne peux rien faire » ; « c’est un problème spécifique ») et qu’ils aperçoivent les défis pour nous tous, que constituent les problématiques des familles Rroms.

A Robinson, nous souhaitons contribuer à créer et inventer de nouvelles modalités d’intervention sociales, à la fois au quartier et dans les camps, propres à prendre la mesure de la réalité sociale.

Innover socialement aujourd’hui revient sans doute à trouver de nouvelles voies et de nouveaux outils pour :

- Favoriser l’expression des personnes et des groupes qui subissent les violences économiques , sociales et politiques

- Développer le pouvoir d’agir et de produire de ces groupes dans les domaines économiques, sociaux et culturels, revient à développer notre pouvoir de vie , à tous. C’est le rôle et la fonction d’une pédagogie sociale.

Celle ci nous amène à investir et à opérer dans les espaces publics, les friches urbaines et institutionnelles et à trouver ensemble… une alternative aux désastres en cours.

— 
Laurent Ott, Association Intermèdes-Robinson
Site : http://assoc.intermedes.free.fr
Blog : http://recherche-action.fr/intermedes/
Vidéos : http://www.dailymotion.com/user/Cul...


Communiqué de presse

1er mars 2013 : lancement du site d’informations alternatives sur les luttes et les pratiques pédagogiques www.questionsdeclasses.org

Le 1er mars 2013 a été officiellement inauguré le site internet « Questions de classe(s) » www.questionsdeclasses.org.

L’initiative, relayée par un appel à soutien qui a circulé sur les réseaux syndicaux et pédagogiques a déjà reçu, à ce jour, le soutien de plus de 430 signataires.

Groupes, associations, syndicats, mouvements pédagogiques, collectifs de luttes ou individus ont besoin de lieux de convergence et de débat, de controverse sur le devenir de l’école, de la maternelle à l’Université.

Partant de ce constat, « Questions de classe(s) » se veut un site internet coopératif autour des luttes sociales et des pratiques pédagogiques visant l’émancipation.

Pour ses animateurs, regroupés dans un collectif d’animation d’une trentaine d’individus*, il y a un lien intime et nécessaire entre pédagogie et lutte sociale. Les réflexions, les luttes et les pédagogies s’écrivent, se partagent.

Ce site se propose, sur le modèle de la « publication ouverte » de créer un espace inédit d’échanges et d’informations autour des questions éducatives (et pas seulement scolaires) qui visent l’émancipation individuelle et collective.

A côté de ce travail d’agence de presse alternative, des personnalités du monde de l’éducation – militants, auteurs, chercheurs, pédagogues – proposeront régulièrement des chroniques sous forme de billets.

Cette initiative a déjà reçu l’appui et le soutien de plus de 430 acteurs du monde éducatif, venus de différents horizons professionnels (enseignants de la maternelle à l’université, chercheurs, étudiants, parents, animateurs, éducateurs, etc.) pédagogiques (militants de l’AFL, du GFEN, de l’Icem, etc.) et syndicaux (Sud éducation, CNT éducation, l’Émancipation, FSU, CGT éducation) et de personnalités diverses (outre le collectif d’animation, Philippe Corcuff, Choukri Ben Ayed, Alain Bihr, Remi Hess, Roland Pfefferkorn, Normand Baillargeon, Angélique del Rey, Jean-Michel Zakhartchouk, Véronique Decker, Jacques Pain...)**

Pour tout contact et informations supplémentaires :

contact@questionsdeclasses.org

Grégory Chambat : 0 628 077 325


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