Accueil > 2013 > janvier > Nestlé et Securitas condamnés au civil pour l’infiltration d’Attac

Nestlé et Securitas condamnés au civil pour l’infiltration d’Attac

Arnaud Crevoisier | lecourrier.ch | samedi 26 janvier 2013

mercredi 30 janvier 2013

lecourrier.ch

Nestlé et Securitas condamnés au civil pour l’infiltration d’Attac
Arnaud Crevoisier | lecourrier.ch | samedi 26 janvier 2013

NESTLÉGATE • Espionnés durant plusieurs années pour le compte de la multinationale veveysanne, les militants d’Attac-Vaud seront indemnisés.

Débouté en 2009 sur le plan pénal, Attac espérait obtenir réparation de la justice civile dans l’affaire dite du Nestlégate. Un an exactement après la tenue du procès, le verdict est enfin tombé. Le Tribunal d’arrondissement de Lausanne a condamné hier solidairement Nestlé et Securitas pour l’espionnage du mouvement altermondialiste. En récoltant des informations « par infiltration dans la sphère privée » des militants d’Attac, les deux entreprises se sont rendues coupables d’« atteinte illicite à la personnalité », a tranché le juge Jean-Luc Genillard. 
La multinationale veveysanne et la société de sécurité sont condamnées à verser, au titre de réparation pour tort moral, 3000 francs à chacun des neufs plaignants. Ces derniers formaient le groupe de travail qui avait été infiltré dès septembre 2003 par une « taupe » employée par Securitas. Sous le nom fictif de « Sara Meylan », elle avait pris part aux réunions consacrées à la rédaction du livre « ATTAC contre l’Empire Nestlé » - ouvrage dont elle avait elle-même écrit un chapitre. L’espionne rendait compte, dans des rapports adressés directement à Nestlé, du contenu de ces échanges, qui se déroulaient au domicile privé des auteurs. Le profil physique des membres du groupe avait également été détaillé. A l’audience, « Sara Meylan » avait cependant réfuté avoir ausculté les penchants idéologiques des auteurs. La taupe avait poursuivi sa mission jusqu’en juin 2004. 
Peu après la révélation, en 2008, de ces agissements, Attac avait découvert qu’une autre employée de Securitas participait, sous son véritable nom cette fois, aux réunions du groupe « Mondialisation et multinationales ». Nestlé et Securitas avaient pourtant affirmé avoir cessé l’infiltration en 2005.
 
Pas de commentaire de Nestlé
Le mouvement a accueilli le jugement avec une « grande satisfaction ». « Cependant, il nous tient également à cœur de souligner que nous restons très critiques face à certains agissements de la multinationale Nestlé dans le monde, notamment en ce qui concerne sa politique hostile face aux syndicats et son pompage excessif de l’eau », a précisé Attac dans un communiqué.
Outre l’indemnisation pour tort moral, les deux entreprises devront s’acquitter solidairement de 14 000 francs au titre des dépens. « Le fait que la justice les condamne à payer nos frais d’avocats montre une responsabilité pleine et entière de Nestlé et Securitas. C’est un jugement très clair et sans ambiguïté », estime Janick Schaufelbuehl. La militante d’Attac salue à ce titre l’indépendance de la justice.
Contacté, Nestlé n’a pas souhaité « faire des commentaires spécifiques avant de recevoir la motivation du juge ». « S’il devait s’avérer qu’un employé Nestlé ait agi de manière négligente, nous prendrons les mesures appropriées », indique seulement son porte-parole. 
De son côté, Securitas a pris acte « du fait que le tribunal civil a donné en partie raison à Attac. Cependant, ce jugement n’a aucune influence sur les activités opératives actuelles et futures de l’entreprise ». Dans un communiqué, la société continue d’affirmer avoir « mis définitivement fin à ces opérations d’observation il y a déjà huit ans. De son propre chef, Securitas avait donc renoncé depuis longtemps à ces opérations discutables sur le plan moral (...). » Securitas se réserve la possibilité de déposer un recours. « Nous attendons de recevoir les considérants écrits du jugement pour nous déterminer », indique son avocat Gilles Robert-Nicoud. I

 

 

Les victimes enfin reconnues

La satisfaction des militants d’Attac est sans doute proportionnelle à la désillusion qu’avait provoqué le non-lieu prononcé en 2009 par la justice pénale. Leur soulagement est aussi à la mesure de l’incertitude qui aura plané jusqu’au bout dans ce volet civil. En dépit des éléments accablants sur l’activité des taupes de Securitas, la reconnaissance de l’atteinte à la personnalité était en effet loin d’être acquise à l’issue du procès. On se souvient que les avocats de la défense s’étaient employés à présenter les membres d’Attac comme des criminels en puissance, pour mieux justifier « l’observation préventive » de leurs activités. Ils avaient ainsi affirmé qu’en raison de leur engagement militant, ceux-ci ne pouvaient « prétendre à une protection de la sphère privée aussi étendue » qu’un simple quidam. Ces arguments spécieux n’ont visiblement pas impressionné le juge, pas plus que le blanchiment pénal dont se prévalaient Nestlé et Securitas. S’il ne répare pas tout – et notamment les séquelles psychologiques durables subies par les personnes espionnées dans leur intimité –, le verdict est bien une reconnaissance du statut de victimes des membres d’Attac. Il agit aussi comme une piqûre de rappel aux principes de base de l’Etat de droit que sont les libertés d’opinion, d’expression et de réunion.

 
 

****
Transmis par Andry Nicol
 Wed, 30 Jan 2013 10:32:25 +0000 (GMT) 

 
 


Voir en ligne : Nestlé et Securitas condamnés au civil pour l’infiltration d’Attac

Un message, un commentaire ?

modération a priori

Ce forum est modéré a priori : votre contribution n’apparaîtra qu’après avoir été validée par un administrateur du site.

Qui êtes-vous ?
Votre message

Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.