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Bonne nouvelle ? : L’armée française peine à recruter et fidéliser ses troupes

Nathalie Guibert | lemonde.fr | mardi 23 octobre 2012

mardi 23 octobre 2012

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L’armée française peine à recruter et fidéliser ses troupes
Nathalie Guibert | lemonde.fr | mardi 23 octobre 2012

L’armée doit mieux traiter sa troupe si elle veut continuer à attirer des jeunes. L’alerte vient d’un organisme indépendant, le Haut comité d’évaluation de la condition militaire. Le sort des 89 000 "militaires du rang", ces soldats, matelots et autres caporaux sous contrat à durée déterminée, qui forment le gros des effectifs, n’est pas des plus enviables, explique le Haut comité dans son sixième rapport annuel, mis en ligne mardi 23 octobre.



Des militaires français embarquent, le 28 mars 2012, à Kaboul, dans l'avion qui les ramène en France.

Des militaires français embarquent, le 28 mars 2012, à Kaboul, dans l’avion qui les ramène en France. | AP/MUSADEQ SADEQ

Ce document touffu, étayé de nombreux chiffres,
est une mine pour la sociologie militaire. Il est aussi un guide
précieux pour qui voudra peser
les avantages du métier des armes parmi ceux des autres
agents de l’Etat. L’on y découvre ainsi qu’un
ménage dont l’un des conjoints est militaire
possède un niveau de vie moyen de 18 % inférieur
au couple d’un fonctionnaire civil, à catégorie
socio-professionnelle équivalente, et ce, quelque soit le
grade.

L’accent mis sur la troupe dans l’édition 2012 n’est pas
un hasard, au moment où la France retire ses forces d’Afghanistan
et alors que les restrictions budgétaires pèsent
lourdement sur le moral de l’institution.

"La professionnalisation des armées
s’est bien passée, mais nous arrivons au bout des
formules qui avaient alors été pensées.
Il faut vraiment tenir
compte du fait que les militaires du rang sont des
professionnels, dans la manière dont on les traite, on
les forme, on gère
leur carrière"
, défend Michel Pinault,
président du comité et membre du Conseil d’Etat.

Ainsi, le contrat de cinq ans renouvelable est trop court, car
il n’offre pas assez de visibilité aux personnes : "Des

gens qui en sont à leur troisième renouvellement
de contrat ne savent pas s’ils seront renouvelés dans
les deux mois qui viennent"
, déplore M. Pinault.

DES DÉLAIS DE RECRUTEMENT "BEAUCOUP TROP LONGS"

Le comité propose un contrat de huit ans, qui
respecterait la nécessité d’avoir une armée jeune et en
bonne condition. Cela permettrait, de plus, de faire des économies dans
l’énorme machinerie déployée par
l’armée pour recruter,
former et fidéliser ses
troupes. Chaque année, il faut gérer ainsi 13 800
embauches et 16 300 départs de soldats. Une gageure dont
témoignent les délais de recrutement, six à
huit mois, jugés "beaucoup trop longs"
malgré la prime d’engagement. Deux défis
surgissent : dans l’armée de terre, on ne trouve plus
qu’1,5 candidat pour 1 poste, "des chiffres
préoccupants"
selon le Haut comité
d’évaluation.

Par ailleurs, "la courbe des départs
spontanés des militaires du rang est en constante
augmentation"
sur la décennie 2000-2010. En 2010,
27 % des soldats ont quitté leur poste un an après
leur engagement, alors que l’armée de terre
s’était fixé 15 % au plus. Pour garder ces soldats, le
comité suggère de donner
un vrai statut aux "vieux briscards". Cette
perspective leur permettrait de mettre
à profit leur expérience opérationnelle, en
les délivrant de l’obligation de passer sous-officier pour rester dans l’armée.

GRAVE DYSFONCTIONNEMENT DU LOGICIEL
DE GESTION DES PAIES

Mettre la priorité, y compris financière, sur les
mesures de soutien aux militaires de la base et à leur famille : la proposition sera
remarquée, alors qu’un grave dysfonctionnement lié au nouveau
logiciel de gestion des paies "Louvois"
exaspère –
et désespère – des milliers de soldats depuis plus
d’un an.

"C’est une affaire très difficile, avec des impacts
considérables. Nous en avions parlé au
président de la République dès septembre
2011"
, explique le président du Haut
comité. Mais le problème, souligne-t-il, a fait
l’objet d’un déni dans l’armée de terre pendant
des mois, et le régler prendra du temps.
L’épisode, ajouté aux restructurations tous
azimuts des régiments depuis 2008, pourrait avoir
détérioré l’image de l’armée.

"La marche à franchir
entre la vie civile que mène un jeune et la vie
militaire est de plus en plus haute, il faut tenir compte de cet
écart"
, souligne encore M. Pinault. Et d’avertir : "il y a finalement très
peu de gens qui viennent vers l’armée parce qu’ils ont
un problème d’emploi.
La crise est souvent invoquée comme un moment plus
propice pour recruter des
militaires. C’est une mauvaise idée"




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