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L’énergie en partage

Olivier Cabanel | agoravox.fr | mardi 2 octobre 2012

mardi 2 octobre 2012

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L’énergie en partage
Olivier Cabanel | agoravox.fr | mardi 2 octobre 2012
    

Au moment ou le lobby nucléaire tente vainement de faire oublier Tchernobyl et Fukushima, affirmant que le nucléaire n’est pas mort, Il serait un peu naïf de croire que la transition énergétique consiste seulement à remplacer les énergies fossiles par des énergies propres et renouvelables : elle pourrait se conjuguer sur 3 axes.


Jeremy Rifkin préconise d’abord de partager l’énergie comme nous l’avons fait avec les réseaux sociaux d’internet : chacun devenant producteur d’énergie, organisant son partage, provoquant ce qu’il appelle « la production distribuée ». lien

Le plus original dans sa théorie, c’est qu’elle n’a pas besoin pour se réaliser de décisions gouvernementales : elle se fait à la base, et a déjà commencé, d’autant que la domotique la rendra encore plus performante. lien

Un manifeste vient d’ailleurs d’être lancé : « pour une transition énergétique locale et renouvelable ». lien

Aujourd’hui l’énergie est centralisée : on a réalisé de gigantesques machines « à produire l’énergie », il faut donc fatalement la transporter toujours plus loin, et plus on la transporte, plus on en perd en route.

De plus, que les centrales thermiques soient au gaz, au pétrole, au charbon ou au nucléaire, il y a au départ un énorme gaspillage de chaleur, l’eau de refroidissement étant rarement utilisée, ou seulement pour des opérations de communication.

C’est le cas d’Aquanord, ferme aquacole qui produit bar et daurades, en récupérant une partie de l’eau chaude de la centrale nucléaire de Gravelines (lien) mais étrangement, l’entreprise préfère ne pas évoquer l’origine de son eau chaude. lien

Il est vrai que la centrale de Gravelines est en train de battre des records inquiétants, celui des ESS (événements significatifs de sécurité). lien

Mais revenons à nos énergies décentralisées.

Il y a donc l’énergie primaire produite et l’énergie consommée, et entre les deux, il y avait en 2008 une différence de 126,8 MTep (millions de tonnes équivalent pétrole) puisque nous avons produit 271,5 MTep, et consommé 144 MTep. lien

La différence ne s’explique pas uniquement par « la perte en ligne THT (très haute tension) », ou le gaspillage lors de la fabrication énergétique, mais le résultat est là. lien

De plus cette énergie transportée provoque de graves atteintes à l’environnement. lien

Chacun sait que les lignes THT dégagent un gaz polluant et dangereux pour la santé humaine : l’ozone atmosphérique ainsi que des ions

Si on ajoute à cet ozone et à ces ions, la pollution électromagnétique, on comprendra la nécessité de transporter le moins loin possible l’énergie électrique. lien

L’ion est un oxydant très actif et peut être toxique pour les êtres vivants, provoquant une augmentation de sérotonine, causant maux de têtes, vomissements, etc.…

Ensuite, il faut pointer du doigt l’absurdité du chauffage électrique : en France, 31% se chauffent à l’électricité, mais le plus grave est que 80% des logements neufs sont équipés de chauffages électriques, ne laissant pas vraiment de choix à l’habitant.

Produire de l’électricité, grâce à la chaleur, et la transporter pour en produire à nouveau est fatalement contre productif.

D’ailleurs nos voisins helvètes ont décidé de bannir le chauffage électrique afin de sortir plus facilement du nucléaire. lien

Il s’agit donc de produire et consommer localement chaque fois que c’est possible, ce qui aurait le triple avantage de permettre une meilleure rentabilité de l’énergie produite, de limiter, voire d’arrêter les atteintes à l’environnement en diminuant drastiquement les kilomètres de lignes THT.

Imaginons par exemple pour un village la présence d’une étable ou d’une fromagerie, comme celle de Tamié, (lien) dotés d’une unité de méthanisation : le méthane fabriqué permet la production d’électricité, grâce à un totem, lequel est refroidi par un réseau d’eau, eau chaude redistribuée à proximité pour le chauffage des habitations, mais le méthane est utilisé sous forme de gaz pour alimenter des chaudières, des cuisinières, ou pour fabriquer de l’électricité.

A une échelle de population plus grande, on peut utiliser les zones de stockage de déchets verts, les stations d’épuration, les égouts…autant de lieux permettant la mise en place d’unités de méthanisation, produisant eau chaude, et électricité.

Et ce n’est qu’un exemple parmi tant d’autres de ce que propose Jeremy Rifkin.

Le deuxième axe consiste à « faire plus avec moins  ».

C’est d’ailleurs l’objet d’une décision européenne qui s’est fixé comme objectif 20% d’économie énergétique d’ici à 2020. lien

La liste du gaspillage énergétique est longue : immeubles de bureau, luminaires et autres publicités éclairés toute la nuit, etc. : les Tours de la Défense en sont le parfait exemple, la tour Pacific ayant gagné le pompon avec 50% de sa façade éclairée la nuit. lien

Quand à l’éclairage public, il peut très bien être réalisé grâce à des réverbères alimentés par le photovoltaïque et l’éolien, stockant d’une façon limitée suffisamment d’énergie dans la journée, pour la redistribuer gratuitement la nuit. lien

Mais le poste le plus important consiste en la rénovation de l’habitat.

L’habitat ancien est généralement très mal isolé, et un programme volontaire d’isolation, outre qu’il sera créateur de milliers d’emplois, (600 000 emplois pourraient être créés grâce aux mesures du grenelle de l’environnement lien) permettrait d’économiser au moins 30% sur nos factures de chauffage. lien

Si l’on prend le détail des déperditions énergétiques, on s’aperçoit que les pertes de chaleur représentent entre 10 à 15% qui s’évacuent par les fenêtres, 20 à 25% par les murs, de 25 à 30 % par le toit, et de 20 à 25% par l’air renouvelé et les fuites. lien

Ce n’est qu’une étape, car ce qui est appelé aujourd’hui « habitat passif » permettrait de réduire la facture chauffage de 80 à 90%, sans oublier les BEPO qui ne consomment plus d’énergie, mais au contraire en produisent. lien

Or, sur le chapitre de la consommation énergétique, la question chauffage représente 43 MTep par an.

En réduisant l’énergie consommée de 85%, nous ne consommerions plus que 6,45 MTep/an.

De plus, il ne faut pas limiter l’isolation au seul habitat, mais il doit concerner aussi les entreprises, les commerces.

Entre les portes qui restent ouvertes, l’air chaud non récupéré, et les circuits de chauffage mal isolés, il y a du pain sur la planche. lien

La dernière étape est d’utiliser uniquement les énergies illimitées dans le temps provenant du vent, de l’eau, de la lumière, soit parce que nous pouvons les fabriquer.

Mais avant d’en calculer le potentiel, il faut déterminer les réels besoins.

Le transport en France correspond à  50 MTep, le chauffage (et la climatisation) à 43 MTep, et les process industriel en sont pour 33 MTep. lien

Sur le chapitre du transport, en reprenant la théorie de Rifkin, en se refusant à consommer « des fraises en hiver », et en limitant donc nos besoins à l’échelle d’une région, voire d’un canton, la part prise par le transport pourrait baisser d’au moins du ¼ , et le méthane fabriqué dans notre pays pourrait couvrir les besoins de tous les véhicules, poids lourds y compris.

Pour le chauffage, théoriquement, nous avons vu qu’il suffirait de 6,45 MTep : le potentiel géothermique du pays permet d’y répondre, puisqu’il est estimé à ce jour à 6 MTep et pour ceux qui, par rapport à leur zone d’habitation ne pourraient en profiter, la méthanisation ou le solaire thermique, pourraient prendre le relais. lien

Sur la question électricité, en écartant le chauffage électrique) elle ne compte que pour 37 MTep, et une économie du ¼ pourrait aussi être réalisée.

Or, l’énergie lumineuse reçue en France représente théoriquement 250 MTep, ce qui est donc largement suffisant pour couvrir nos besoins. lien

Si l’on regarde de plus près l’énergie hydraulique largement sous exploitée, elle représente 4,8 MTep (lien) : si en 1960, elle comptait pour 56% elle s’est réduit aujourd’hui à 17%. lien

Il faudrait y ajouter le petit hydraulique, dont le potentiel est passablement négligé : pour la seule région PACA, il représente 125 MW installables, soit 670 GWh annuels, soit 57 600 tep, et si cela reste modeste, il faut tenir compte que cette énergie peut être facilement consommée sur place, à l’échelle d’une ou plusieurs communes, sans qu’il soit besoin de la transporter trop loin.

L’éolien offshore, ou terrestre en France a un potentiel de 17,2 MTep, (lien) mais il faudrait s’intéresser aussi au petit éolien, limité à l’habitation individuelle : pour un investissement relativement modeste, il permet de produire 38 kW/h par mois. lien

En résumé, la demande énergétique réelle serait pour le poste transport de 37,5 MTep, celui du chauffage de 6,45 MTep, pour l’électricité de 27,75 MTep, soit une économie de 58,3 MTep, et la consommation des français ne serait plus que de 85,7 MTep, au lieu des 144 MTep consommés aujourd’hui.

Cette transition énergétique en trois temps n’est donc pas si utopique que certains l’affirment, et comme dit mon vieil ami africain : « un petit marteau casse de gros cailloux  ».

L’image illustrant l’article provient de « greenforyou.be »

Olivier Cabanel

Merci aux internautes pour leur aide efficace.
   


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