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A Toulouse, le Centre Social Autogéré du CREA expulsé... Sale temps pour les pauvres !

sharedwanderlust.wordpress.com & creatoulouse.squat.net | mardi 28 & mercredi 29 août 2012

mercredi 29 août 2012




Sale temps pour les pauvres.
| sharedwanderlust.wordpress.com | mardi 28 août 2012

Ce texte est écrit de mon point de vue personnel, n’a pas été dicté par une organisation quelconque et les opinions qui y ont exprimées n’engagent que moi. ]

Six heures vingt du matin. Texto : l’expulsion du CREA est en cours. Je suis réveillée.

[Parenthèse avant que je me laisse emporter par le feu de l’action : c’est quoi, le CREA ?

Depuis un an et quelques mois, à Toulouse, c’est le Collectif pour la Réquisition, l’Entraide et l’Autogestion, installé dans les locaux abandonnés et réquisitionnés de l’AFPA pour y construire un centre social autogéré (le CSA, qu’on appelle simplement le CREA par commodité). Dans ce centre habitent neuf familles, soit une quarantaine de personne dont quinze enfants. La majorité de ces familles est en situation extrêmement précaire (immigrants, sans-papiers, etc).

Le CREA, depuis un an, c’est donc un lieu d’habitation. Il vient du constat fait par plusieurs personnes que les structures de l’Etat qui sont censées aider les précaires, personnes à la rue, etc, ne sont pas efficaces. Il y a peu de place en hébergement, 95% des appels au 115 sont rejetés par manque de place en centres d’hébergement ou de moyens pour payer les nuitées d’hôtel.

Le CREA a donc été créé comme un lieu de vie stable pour que ces familles puissent trouver un endroit où vivre tranquillement sans être transbahutés d’un service social à l’autre à la recherche d’une solution. Et ça marche : pendant un an, le lieu a fonctionné en autogestion (assemblées générales régulières des habitants du lieu, décisions communes, etc) et sans argent. Tout se fait à partir de récup’, de solidarité, de dons. Les enfants sont tous scolarisés, le CREA devient un véritable lieu de vie ; on y trouve diverses activités pour les enfants et pour les adultes (activités artistiques, cours de langues, sport, échange de compétences...) et une stabilité dans la vie en commun qui fonctionne au cours du temps, permettant au CREA de créer du lien social, des solidarités, de l’entraide.

Le CREA n’a jamais demandé un centime de subventions.

Le bâtiment, au 70 allées des Demoiselles, appartient au Ministère du Logement.et des Solidarités Sociales (ha, ha). Le ministère décide d’engager une procédure d’expulsion contre le collectif, lance un procès. La raison de cette volonté d’expulsion ? Il veut construire un centre d’aide aux personnes précaires dans ces locaux (ha, ha).

Au cours de l’année, diverses personnes (policiers et autres) s’introduisent dans le CREA pour en examiner la “sécurité”, pinailler parce que le toit est vert de mousse et que cela mettrait en danger la vie des habitants, en faisant un logement insalubre, tester le taux d’amiante, vérifier que les portes anti-incendie s’ouvrent bien, casser les autres portes de façon parfaitement illégale, et généralement embêter les habitants.

À la suite du rendu de la décision du juge, le CREA est expulsable depuis mi-août. Depuis avant la tenue du procès, les habitants du CREA tentent de contacter la mairie, la secrétaire d’État au Logement, la ministre, la préfecture, etc, tout cela sans réponse. Ce matin, la préfecture publie un communiqué de presse dans lequel on peut lire ceci : “les occupants ont toujours refusé les propositions de contact formulées par les services de l’État”. ]

Il est six heures trente et je suis sur la route du CREA. Je me retrouve devant un cordon de police qui m’empêche de passer. Je fais le tour pour retrouver les autres personnes qui sont sur le pont des Demoiselles.

La situation ? À six heures du matin, les flics défoncent les fenêtres du premier étage et font irruption dans l’immeuble. Les familles arrivent à se mettre en sécurité ailleurs, restent quatre personnes qui décident de monter sur le toit pour attendre.

Nous observons tout ça d’en bas. Quatre types sur le toit glissant (il pleut), dont un assis à califourchon sur une poutre en métal qui dépasse. Les pompiers se ramènent… pour prêter leur nacelle aux flics qui veulent cueillir les mecs sur le toit. Ils montent la nacelle pour voir et redescendent.

Pendant ce temps, les ouvriers arrivent. Leur travail est de murer le bâtiment le plus rapidement possible pour que plus personne ne puisse y rentrer.

Nous sommes toujours devant un cordon de flics, à crier des encouragements à nos oiseaux perchés.

La compagnie qualifiée pour intervenir est normalement le GIPN, mais aujourd’hui, innovation : ce sont des CRS alpins. Ils essaient de mettre un crochet dans la gouttière à partir du 5ème étage pour monter sur le toit, mais ils n’arrivent pas à monter à l’échelle de corde. Pendant ce temps, les types du toit enlèvent leurs cordes de sécurité, je suppose que c’est pour obliger les flics à être un minimum prudents dans leur gestes. Les flics font des gestes brutaux alors que les mecs du toit risquent leur vie au moindre mouvement.

La nacelle remonte. Un flic arrive sur le toit par la lucarne, c’est le négociateur. Y a-t-il négociation ? Non. Les trois mecs du toit ne veulent pas se laisser embarquer, ils ne sont toujours pas attachés. Celui de la poutre reste sur sa poutre.

Que font les flics pour embarquer les types qui ne veulent pas se laisser embarquer ? Je vous le donne en mille : ils sortent un täser.

Ils täsent une personne sur le toit glissant, à une vingtaine de mètres de hauteur, sans sécurité. Où le täsent-ils ? Au visage. Combien de fois ? Cinq. (Dans la loi, l’utilisation du taser doit se faire « à l’encontre des « personnes violentes et dangereuses », doit « rester strictement nécessaire et proportionné », et seulement dans le cas de légitime défense (article L. 122-5 du code pénal), l’état de nécessité (article 122-7 du code pénal), ou en cas de crime/délit pour arrêter les auteurs du délit.) Où est la personne violente et dangereuse dans un mec assis sur un toit ? Où est la proportion dans le fait de répéter cinq fois la décharge de täser ?

Les flics chopent ensuite ce gars et le font descendre pendu par les pieds, tête la première, dans la lucarne, pour l’embarquer. Les deux autres mecs du toit ont aussi résisté, on les emmène de façon musclée (coups, étranglement) et on les fait descendre également tête en bas pour les emmener au poste.

Pour protester contre cette violence inutile, les personnes qui étaient là en soutien derrière le cordon de police décident de bloquer le pont. Après environ une minute de blocage de pont (nous empêchons les voitures de passer), les CRS, qui devaient s’ennuyer, depuis tout ce temps, chargent sans sommation. Matraque au vent, flashball sortis. Nous sommes trente, ils sont le double au moins. Nous résistons et tentons d’encaisser la charge. Gros choc. Une dizaine de personnes se font matraquer à tout va, ça tape dans les bras et dans les cuisses. Nous courons pour nous enfuir. Je me retourne pour voir une copine entourée de quatre flics qui la frappent avec leurs matraques sur les bras et les jambes. Finalement nous nous enfuyons tous en courant pour souffler un peu, prendre du recul et soigner les bobos. Beaucoup de bleus, quelques bosses, pas d’arrestations.

Je publie cet article parce qu’aucun média n’a parlé de la violence policière ni de la disproportion de toute cette affaire. Cinq ou six médias différents étaient présents pendant tous ces évènements. La majorité de ces médias se sont contentés de citer le communiqué de presse de la préfecture et le point de vue de la police.

Je publie cet article pour livrer ma version des faits. Je tiens ce blog seule, je n’obéis pas à la pression d’un rédac-chef ou à la hiérarchisation des sujets selon le revenu publicitaire qu’ils doivent apporter.

Au-delà de la révolte que cette violence suscite en chacun de ceux qui la subissent, il importe de s’interroger.

Nous étions tout au plus quarante. Ils étaient deux cents

Une opération de ce genre coûte plusieurs dizaines de milliers d’euros à l’État.

L’État ferme chaque année des places en hébergement de SDF par “manque de moyens”.

Les trois mecs du toit sont restés une douzaine d’heures au poste. Chefs d’accusation : outrage et rébellion. Ils ont : refusé d’obtempérer aux ordres des CRS, et se sont accrochés à la cheminée pour ne pas descendre. Ils n’ont pas eu de geste agressif envers les flics.

Les CRS qui sont intervenus sur le toit ont demandé cinq jours d’interruption temporaire de travail à l’hôpital. Quand les CRS demandent des ITT, on leur donne une prime (ça fait partie des risques du métier de se blesser en frappant des gens, hein.). Il n’y a de toute évidence pas de blessure qui justifierait cette ITT.

L’État expulse le CREA parce que le CREA sort de la logique qui veut que nous ayons besoin de chefs et d’argent pour vivre. Le CREA montre de façon éclatante que l’organisation et la solidarité sont possibles entre nous et créent des espaces de vie que l’on n’aurait jamais imaginés autrement.

Pour qu’il y ait un tel empressement à l’expulsion et des mensonges aussi gros à propos du supposé “projet” pour le bâtiment, c’est bien que le CREA dérange. Que les pauvres qui s’organisent entre eux dérangent. Il faut donc les dégager à coup de matraque.

Merci, gouvernement socialiste.

(S’il vous plaît, faites tourner ce texte.)

Par là : le site du CREA

Pour les médias de merde, vous savez utiliser un moteur de recherche aussi bien que moi.


aaa


Lettre ouverte au préfet de Haute-Garonne et à celles et ceux qui ne se satisfont pas des déclarations officielles et des violences policières.
| creatoulouse.squat.net | mercredi 29 août 2012

Posted on 29/08/2012 | Leave a comment

Le 29 Août 2012

SUITE A L’EXPULSION DU CREA

Lettre ouverte au préfet de Haute-Garonne et à celles et ceux qui ne se satisfont pas des déclarations officielles et des violences policières.

Ainsi ça y est, les familles et les militant-es qui ont transformé un bâtiment vide et abandonné en un lieu collectif de vie, de créations et d’échanges de savoirs réciproques, toutes et tous renvoyé-e-s à la rue !

Nous, soussigné-e-s, avons participé à notre manière, suivant nos possibilités, à cette vie collective du 70 allées des Demoiselles depuis avril 2011.

Nous y avons développé de multiples activités, qui en ont fait un lieu d’échanges multiculturels où nous avons partagé, habitant-es et militant-es, nos savoirs et savoirs faire, permettant de développer sur le long terme des relations de confiance et une valorisation de toutes et tous.

Ces activités mises en place prennent tous leurs sens au sein des engagements politiques du CREA.

Parmi les activités permanentes :

 Atelier lecture : tous les mardis avec les enfants. Régulièrement, ce moment partagé d’écoute d’histoires, de découvertes de beaux albums permettaient aux plus grands scolarisés, de vérifier leurs apprentissages et aux plus petits le plaisir de découvrir, d’écouter, de patienter et d’apprendre ainsi le « vivre ensemble ».

 Atelier français : les mardis et jeudis soir. Nous nous sommes adapté-e-s aux personnes venant de tous les horizons avec des expériences et des besoins différents. Nous avons tenu compte de chacun-e et des idées et pratiques de la collectivité CREA : bavardages, échanges d’expériences, de tuyaux, de recettes, rigolades, discussions sur les différentes langues, sur les difficultés de l’orthographe, des règles de grammaire française, avec les débutant-e-s, un travail méthodique sur la prononciation, l ’écriture et la construction de phrases.

 Atelier cuisine : tous les mercredis après-midi, il a accueilli tous les publics. Le lieu, où vivent des familles originaires des cinq continents, se prête particulièrement bien aux échanges de recettes et à l’apprentissage des différentes cuisines du monde. L’idée de « faire ensemble » dans cet atelier est très importante.

 Coin jardinage : dans un autre lieu réquisitionné, un jardin potager a été mis en place progressivement puis entretenu par des militant-e-s en sensibilisant les enfants au travail de la terre.

 Escalade : tous les vendredis, adultes et enfants se retrouvent dans une pratique encadrée de l’escalade en salle.

 Permanences psychologiques : proposées tous les quinze jours, elles étaient ouvertes à toutes celles et ceux qui souhaitaient rencontrer un psychologue pour prendre un temps d’échange et d’écoute, nous y avons rencontré des habitant-e-s du lieu mais aussi des personnes extérieures qui n’avaient jamais faits cette démarche ou bien dont la démarche n’avait pas aboutie (coups d’une consultation libérale, liste d’attente dans les dispositifs de droit commun, accueil classique trop formel ou peu engageant…). Ce lieu nous a permis d’envisager d’autres modalités d’accueil et d’accompagnements psychosociaux plus respectueux des choix et contextes de vie de chacun-e (mise en lien sur le lieu avec les pratiques sportives ou culturelles, connexion avec d’autres initiatives militantes, accessibilité de l’échange par une proposition de contributions non monétaire pour le lieu…).

D’autres activités comme la boxe, la capoeira, des ateliers d’arts plastiques… se sont également déroulées et l’accès à la bibliothèque et à la salle de jeux était permanent. De plus, des activités ponctuelles ont régulièrement eu lieu durant toute l’année comme des ateliers théâtre, visites de musées, des soirées d’observation astronomique, piscine, projections et spectacles…

Les échanges ainsi créés ont permis aux habitant-es de s’exprimer individuellement sur leur parcourset nous avons pu leur faciliter ainsi l’accès à leurs droits légitimes face aux administrations (aide médicale, scolarisation…) en les accompagnant dans leurs démarches.

Militant-e-s, nous nous sommes simplement engagé-e-s dans cet « autre chose » : faire vivre ensemble, ici et maintenant, l’hospitalité, l’entraide et la dignité !

L’expulsion ne mettra pas fin à tout ce qui a émergé dans ce lieu !

Nous continuons.

On peut abattre des murs, on n’abat pas la solidarité.

Patrick Baggi, Aurélie Bonneville, Anne Bouvier, Anaïs Canal, Gabrielle Carvin, Agnès Dantagnan, Sandra Lima, Chantal Limare, Alain Petit, Émilie Quérol, Gérard Vallerey.



****
Transmis par Gérard Valler
collectifs locaux anti-délation
Wed, 29 Aug 2012 14:15:50 +0200




Voir en ligne : Sale temps pour les pauvres.

Messages

  • bonjour,

    je suis tout a fait d’accord avec ce qui a été écrit.
    en effet, j’ai vu la violence polivière gratuite à ce moment là,
    je n’ai pas pu porter pleinte car c’est ma parole contre la leur et cela n’a pas marché
    je suis pour que cela change donc je cherche un moyens de faire comprendre aux flics qu’ils abusent du pouvoir et de les calmer leur violence.

    la violence gratuite de telle façon est une horreur
    faut faire qq chose
    S’il vous plaît
    comment fait on pour arrêter cela ???

    P.S : soutien entièrement la CREA et ils ne méritent pas ça.

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