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Les salles d’injection sont "une porte de sortie de la toxicomanie"

LEMONDE.FR | 24.09.10 | • Mis à jour le 24.09.10 |

dimanche 26 septembre 2010

Transmis par Anne & Ahmid -
Date : Sat, 25 Sep 2010 -

Organisation : PAMF


Laurent El Ghozi, président de l’association Elus, santé publique et territoires (ESPT)

Aline Leclerc/Le Monde.fr

Dans la salle de consommation de drogues supervisée de Bilbao (Espagne), tout le matériel est fourni sur place pour des raisons d’hygiène.

Après plusieurs mois d’auditions d’experts médico-sociaux, de juristes et la visite de deux salles de consommation de drogue supervisée à Bilbao (Espagne) et Genève (Suisse) , l’association Elus, santé publique et territoires (ESPT), qui regroupe des élus de gauche comme de droite, rend publics, vendredi 24 septembre, les résultats de son enquête.

Après le débat virulent qui a éclaté sur le sujet cet été en France, divisant particulièrement au sein de l’UMP (édition abonnés), les élus d’ESPT plaident pour l’ouverture de ces salles en France et publient une série de recommandations dans ce but, explique le Dr Laurent El Ghozi, président de l’association ESPT et conseiller municipal PS à Nanterre (Hauts-de-Seine).

A quelles conclusions est arrivée votre association, après avoir enquêté sur la prise en charge des toxicomanes ?

Laurent El Ghozi : Il faut évidemment aider les toxicomanes. Les centres d’injection sont des outils, qui ont déjà fait, hors de France, la preuve de leur efficacité. L’Inserm (Institut national de la santé et de la recherche médicale) en a apporté la preuve dans un rapport publié cet été. Offrir aux toxicomanes de bonnes conditions d’hygiène à leur pratique est un préalable indispensable pour obtenir une réduction des risques (overdose, sida, hépatite…) liés à leurs pratiques. C’est également le moyen d’ouvrir une porte de sortie de la toxicomanie. C’est un long processus qui commence par un accompagnement de la prise de drogue puis, éventuellement, la prise de produits de substitution, qui peut mettre un terme à l’addiction.

Evidemment, ce genre d’établissement ne peut ouvrir sans le soutien des collectivités locales. Il est nécessaire de consulter les élus et d’obtenir leur accord. En ce qui concerne le voisinage, l’expérience montre que les centres servent à pacifier les relations entre les habitants et les usagers de drogues. Moins de bagarres, moins de seringues qui traînent par terre, un environnement plus sain. Enfin, à chaque centre est attaché un régulateur. C’est une personne chargée de faire le lien entre les usagers et les voisins du centre, un interlocuteur privilégié, qui s’attache à faire corriger les éventuelles incivilités et permet de trouver des réponses sans faire intervenir la police. Les salles d’injection sont des outils de pacification.

L’ouverture de salles d’injection semble dépasser les clivages politiques. Quels sont les arguments avancés de part et d’autre ?

Il existe deux points de vue sur la création de salles d’injection. Il y a d’abord l’analyse pragmatique : c’est celle des soignants, qui assistent à la souffrance des hommes et des femmes qui sont enchaînés à leur addiction, et des élus locaux, qui ont le devoir de prendre en compte les problèmes de voisinage liés à la mise en place de ce type de centres. Ces deux catégories sont à la recherche des solutions qui répondront à ce problème de santé publique.

Il y a ensuite ceux qui ont une vision juridique, voire idéologique. Selon eux, la loi est la loi et il n’y a pas à en démordre. Etienne Apaire (président de la Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie) fait partie de ceux qui suivent cette ligne.

On n’imagine pas de ne pas venir en aide à un diabétique. Mais à un toxicomane, si ! Ce raisonnement est souvent tenu par ceux qui ne connaissent pas les toxicomanes et qui considèrent ces personnes comme des délinquants, pas comme des malades. Pour résumer leur analyse : celui qui fait ce qui est interdit n’a pas à être pris en charge.

Etienne Apaire s’est en effet déclaré résolument contre l’expérimentation des salles d’injection en France. Leur ouverture ne semble pas pour demain…

Roselyne Bachelot, ministre de la santé, a déclaré son intérêt pour une expérimentation. Est-ce la ministre de la santé ou Etienne Apaire qui décide des choix de santé publique aujourd’hui en France ?

De nombreux élus locaux se sont saisis du sujet. Marseille [dirigée par l’UMP] a mis en place un groupe de travail. Paris [dirigé par un élu PS] va faire de même. De nombreux rapports français et étrangers soulignent l’intérêt de santé publique des salles d’injection. La commission parlementaire ne pourra s’asseoir indéfiniment sur ce sujet.

Propos recueillis par Eric Nunès


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